« Fantasia » (Magnard) et le roman à dominante historique (4)
Les
récits à dominante historique, visant parfois les 9-12 ans mais surtout les
12-15 ans, de la collection « Fantasia »,
chez Magnard, couvrent toutes les périodes historiques, des premiers temps de
l'humanité à la deuxième guerre mondiale, (Direction
Hy-Vong de Luce Fillol évoque même le Vietnam de 1969).
En
fait, c’est plus de 50 récits historiques que propose, au fil des ans, la
collection « Fantasia ».
Préhistoire et voyages dans
le temps
Dès
1967, Claude Cénac amorce sa trilogie préhistorique avec Les Cavernes de la
rivière rouge (Noûm, boiteux, ne
peut chasser mais le sorcier Abaho l’initie aux secrets de la nature). Le 2e
volume, Les Sorciers de la rivière rouge
(le voyage est long et périlleux pour Abaho et son jeune disciple Noûm), ne
paraît qu’en 1984. Les histoires se passent à l’âge de la pierre taillée. Un 3e
et dernier tome : Les Sorciers de la
rivière rouge sort en 1988 dans la collection « Fantasia Poche
Historique ».
En
1969, Antoine Reboul crée la fiction préhistorique Le Livre de Napur qui conte l’aventure d’un adolescent de 14 ans,
Napur, lequel a échappé au massacre de son clan et se réfugie dans l’île d’un
fleuve où il apprend à survivre.
Les romans de Jean-Claude
Froelich mêlent Histoire et S-F dans plusieurs volumes puisque l’auteur raconte
plusieurs les missions de deux ethnologues du Bureau d’Investigations Spatio-Temporelles
(I.S.T.), Pierre Briant, Jacques Hirsh et de l’adolescent Jean-Claude Thierry. Ces
personnes sont envoyées dans le passé à diverses époques grâce à une machine à remonter le temps. Elles font ainsi un Voyage au pays de la pierre ancienne
(1962), dans le Sud de la France de l’époque glaciaire, il y a 12 000 ans.
Dans Naufrage dans le
temps en 1964, les membres du Bureau d’Investigations Temporelles se retrouvent d’abord
chez les hommes-singes qui vivaient il y a 800 000 ans. Quand la foudre endommage
leur « transchrono » sur la route du retour, ils sont victimes d’une panne. Ils découvrent alors l’esclavage du monde antique,
avant de connaître les Ligures et Marseille au VIe siècle avant notre ère.
Une
autre expédition envoie les voyageurs du temps au cœur de La
Horde de Gor (1967), au temps des Néanderthaliens, puis chez les Carnutes de la
Loire dans La Gaule appelle I.S.T. Le
Masque du taureau, évoquant les merveilleuses cités de la Crète, 1450 ans
avant notre ère, paraît deux ans plus tard.
Pierre Debresse et
l’Antiquité
Si
Marcelle Joignet ne livre qu’un récit, celui du petit astronaute, Pierrot
dans l'Olympe, pour une découverte de la mythologie, Pierre Debresse,
consacre cinq romans à l'Antiquité.
Après
un détour en Gaule, au temps des druides, avec son premier récit, Samorix et le rameau d'or (1965), il poursuivra
sa route jusqu'à La Ville aux sept collines (1970), un roman dont la
richesse lexicale éclaire la Rome antique, en l’an 172. (Nous
y reviendrons plus en détail dans un autre chapitre). Dans l’intervalle
paraissent deux récits. Les Larmes d'Isis (1967) revisite l’Egypte au 13e
siècle avant J.-C. et le drame du Libyen El Senoussi, fait prisonnier devant
Kadesh et injustement accusé par un scribe jaloux. Le Trésor de Carthage
(1967), évoquant l’ultime lutte de Carthage contre Rome, obtient le Prix
Fantasia en 1968. La Grèce antique inspire ensuite Né à Sparte (1971). d’une
grande richesse documentaire.
En
1982, Jeannette Jan publie Prends-garde
Laodice !, ancrant son récit à Athènes au siècle de Périclès. Qui peut
en vouloir à Laodice, la fille de l’exilé Nicias ? C’est au lecteur de le
découvrir.
Quand
Le Celte au torque d’ambre mène son
combat contre les légions romaines, Marc Michon campe le prestigieux cavalier
Matarix et la fière Gauloise Hëlioda, dans une Gaule envahie par les troupes de
Jules César.
Fictions historiques et
Moyen Âge
Le
Moyen Age du XIIIe siècle est au cœur du récit, Le Chevalier aux yeux clairs (1974) quand s’affrontent Jehan le
Preux et Jehan le Gueux. Le château féodal qui domine Villepreux est la demeure
du baron Pierre et de ses deux fils. A cette époque le pourvoir féodal recule.
La bourgeoisie qui souhaite une charte dénonce les abus des droits
seigneuriaux.
Cette époque est bien
restituée dans L'Homme au chaperon vert où Suzy Arnaud-Valence convoque
Armagnacs et Bourguignons qui s'affrontent. Dans ce récit, excellemment
documenté, Gilles, le fils de Maître Anselme, a de bonnes raisons d’enquêter
sur cet homme au chaperon vert, surtout depuis qu’on a enlevé son frère Aubin.
Dans Le Vainqueur de
Hastings, Marguerite Deville, passionnée pour Guillaume le Conquérant, évoque
ainsi Guillaume,
le Normand descendant des Vikings qui, après un débarquement en Angleterre,
part à la conquête d’un pays dont il devient le roi.
Tête
d'étoupe de
Marc Michon se passe pendant le long siège d’Orléans par les Anglais. Tête
d’étoupe, jeune étudiant en rupture d’université, a fort à faire pour vaincre
sa peur.
Dans
Tremblez godons ! (1978)
d’Alice Piguet, nous sommes en 1429.
Paris est occupé par les Anglais et les Bourguignons. La ville s’apprête à
résister à Charles de Valois et à Jeanne d’Arc. Une famille de drapiers assiste
à ces querelles partisanes.
Marcelle
Manceau illustre la Renaissance avec L'Inconnu d'Amboise.
Isabelle de Morteau, première dame d’honneur de la reine Claude sera-t-elle
contrainte à épouser le vieux comte de Basseterre ? Comment choisir ce
barbon alors qu’elle ne peut oublier le bel Angelo, un jeune homme qui est
peut-être en outre un disciple de Léonard de Vinci ?
Le
Poëzat-Guigner, déjà chroniqueur en 1572, Au temps des Trois Henri, se
passionne pour le XVIIe et le XVIIIe siècle : Le Pré du Roy se passe
au temps de Louis XIV, Le Fils de la liberté et Le Lys et le bleuet
dans le siècle suivant. Mais nous reviendrons plus tard sur ces quatre romans
de Joseph Le Poëzat-Guigner.
C’est au XVIIe
siècle, sous
Louis XIII, que
se situe L’Abandonné de l’île aux vaches (1968) de Claude Esil. A
Paris, trois garçons trouvent un bébé abandonné. Malgré ces temps troublés, ils
vont rechercher sa famille.
Yves Pèlerin choisit aussi le cadre historique du XVIIe
siècle pour son récit, Dix mille brasses de courage (1970).
En 1620, sous Louis XIII, le Gascon orphelin, Pierre Lasnier, engagé dans les
armées du roi, tente de gagner la côte française, depuis l’île de Ré, en évitant les chicanes
anglaises.
Pierre Debresse introduit Les 7 « J » chez le roi Soleil (1969). Aides-jardiniers et
porteurs d’eau, sept enfants aident leur oncle Balise, quatrième jardinier du
roi Louis XIV et ils sont mêlés aux jeux des petits nobles dans l’immense
demeure royale.
Alice
Piguet est l’auteur d’une belle trilogie située d’abord en Italie, puis en
France, au XVIIe siècle. Tonio
le Bouligant (1964) effectue la traversée du Mont-Cenis, en allant de Turin
à Lyon. Le patient petit Piémontais doit combattre les rigueurs de la nature,
la méchanceté de certains avant de pourvoir retrouver son père. Auparavant, il
se sera lié d’amitié avec un petit
ramoneur. Tonio et les traboules (1965) a évidemment Lyon pour cadre puisque l’on
sait que les traboules désignent les rues pittoresques de cette ville. Dans
l’atelier du tisseur de soir, Tonio doit tirer les cordes. Heureusement que
quatre amis l’aident à surmonter son ennui et son sentiment de désespoir.
Lorsque paraît
Tonio la Franchise (1970), Antonio Morelli, petit tireur de corde, est devenu compagnon tisserand.
C’est le 3e épisode du cycle mais Traîne les
cœurs, paru en 1977, met en scène le jeune Lyonnais Baptiste, un
ami de Tonio la Franchise. En 1669, après avoir traversé l’Atlantique, il
découvre le magnifique Québec.
Peu de récits évoquent la période révolutionnaire.
Raison de plus pour citer Citoyenne Marie-Josèphe de Claude Esil. Nous sommes
sous la Terreur et les têtes se succèdent sur l’échafaud !
« Fantasia » réédite en 1967 le roman de Georges Nigremont (alias Léa
Pelletier), Jeantou, le maçon creusois (d’abord publié chez Bourrelier en
1937). Ce récit évoque la vie difficile d’un maçon et de son fils
Jeantou, au XIXe siècle. Ils partent à pied, de la Creuse vers
Paris.
De René Raillet, est publié en
1971, Le Sergent Trois-Rivières. A l’époque
où le Canada était français, à la bataille de Carillon s’affrontent Anglais et
Français tandis que tribus indiennes et coureurs des bois se mêlent au conflit.
Mais qui est le sergent Trois-Rivières adopté par le capitaine de Julincourt, à
qui il fut donné par un sachem huron ?
Suzy Arnaud-Valence et ses autres
romans historiques
Dans
La Longue veille (1963), l’action se
déroule à l’époque lointaine des grandes découvertes. Joos et le navire La
Belle Espérance sont à la recherche d’un passage vers la Chine, en passant par
le Nord.
Suzy
Arnaud-Valence fait ensuite un saut jusqu’à l’époque de l'Empire napoléonien,
quand les lecteurs découvrent Douze marches dans la falaise. Au cœur de
ce XIXe siècle, deux enfants trouvent un officier blessé et traqué parce que resté fidèle à
Napoléon après sa chute.
L’auteur
réalise ensuite une trilogie dont le premier tome s’intitule Le Rendez-vous
de l'arbre mort (1971). Dans cette France de la défaite et de l’invasion de
1814 se rencontrent Pierre-Jean le colporteur, Pierre-Marie, l’adolescent
mystérieux et d’autres personnages amicaux. On les retrouve sur les routes,
dans Les Fils du jour (1973), c’est-à-dire les Compagnons du Tour de France, quand Pierre
Marie, tout nouveau dans la compagnie, se confronte au monde du travail. La
trilogie s’achève avec Trois graines dans
un pot de grès (publié dans « Le Temps d’un livre », en 1976).
Première et Deuxième Guerre
Mondiale
Seul,
le récit de Léonce Bourliaguet, Le Franzmann, évoque la guerre de 14-18.
Après la montée
désastreuse de Verdun, un jeune soldat est capturé par les Allemands et envoyé
dans un « Kommando » agricole.
En
revanche, le choix est grand pour le conflit suivant et la Résistance , de L'Enfant, le soldat et la mer de Georges
Fonvilliers (à contre-courant des récits habituels puisqu’il montre une
adolescent de 13 ans tissant des liens d’amitié avec un Allemand), à La
Rue qui descend vers la mer de Nicole Ciravegna, quand Aldo et Sarah, en
janvier 1943, à Marseille, connaissent des heures tragiques. René Antona
choisit les nouvelles pour constituer le recueil, Et pourtant l'aube se leva.
Au moment de l’exode de 1940, dans La Maison du
Batiou (1969) de Francine de Selve, le jeune Abel, séparé de son groupe,
est recueilli par un ivrogne qui révèle peu à peu sa nature généreuse. Claude
Munoz-Pons évoque les singuliers pensionnaires de l’école de Beauvallon,
pendant la dernière année de l’occupation allemande, dans En attendant le
jour (1971).
Faut-il considérer comme des
« romans historiques » les récits d’Antoine Reboul ? Ou, si l’on
considère qu’ils donnent, à travers les aventures de Buck Murding, un éclairage
sur la fin de la Deuxième Guerre Mondiale dans le Grand Nord. Il faut lire
successivement Pour que la neige reste blanche (1963), Murding et la loi du Nord (1965) et Murding et la piste des
rennes (1968).
C’est dans
la France occupée des années 40, que s’ancre le récit de Zlata Pirnat, Comme une source (1971). Un enfant de
mère juive devient le fils d’un ménage paysan. Bien plus tard, un homme venu
enquêter sur la disparition de sa femme reconnaît dans l’adolescent avec lequel
il s’est lié d’amitié son propre fils. Il se contentera d’être son
correspondant amical.
Petit
Roumain violoncelliste, Ionel doit fuir son pays pour Paris, quand Hitler
menace l’Europe. Quand la France est occupée, le jeune juif échappe de peu à la
déportation et se cache. C’est ce que raconte le livre d’Hélène Ray : Ionel, la musique et la guerre (1972).
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