Ecrivaine
pour la jeunesse, elle s’appelait Jacqueline Cervon (Cervon, 6 juillet 1924-Cervon, 7
juillet 2014)
Née Jacqueline Séné dans une famille d’artisans menuisiers-ébénistes de
la Nièvre dont elle a hérité le goût du travail bien fait, devenue Jacqueline
Moussard par son mariage, l’écrivaine a choisi pour pseudonyme le nom de son
village natal.
Après des études de lettres et l’obtention d’une licence de lettres
classiques, elle réside huit ans à Djibouti avant de revenir en France, d’abord
en Bourgogne puis dans son Morvan natal. On comprendra mieux son attachement au
monde rural et aux villages de tous les continents
Dès lors, elle se consacre à sa famille et à l’écriture de romans
inspirés par ses nombreux voyages. Chaque année, elle entreprend en effet, en
voiture équipée, avec son mari, de longs
voyages dans les contrées d’Afrique ou de l’Orient (traversée du Sahara, Maroc,
Turquie, Iran..), en dehors des circuits balisés pour les touristes. L’Europe
n’est pas négligée pour autant puisque, par exemple, Joao de Tintubal évoque le Portugal, Le Naufragé de Rhodes et Le
Trésor de Nikos, la Grèce, Les
Chevaliers du Stromboli et Francesco,
l’Italie…
À ce propos, Claude Bron écrit : « Femme cultivée et femme au goût artistiques très sûr mais vivante,
enthousiaste, tonifiante, ayant le goût des voyages, voyages dont elle profite
au maximum, campant ici, campant là pour
faire comprendre ceux dont elle retracera –adultes ou enfants- la vie dans un
contexte qu’elle veut authentique et
dont elle s’inspire pour imaginer des histoires vraisemblables. » (1)
La plupart de ses récits ont été publiés par les éditions G.P. de 1961
à 1982. On rencontre également quelques-uns de ses 40 romans chez Magnard,
Duculot, Rageot et à L’École des Loisirs en 2004.
Seuls deux ouvrages ont été réédités dans les collections de
poche : Djinn la malice dans
« Le Livre de poche Jeunesse » en 1981 et Le Feu aux poudres présent dans « Castor Poche Senior »,
chez Flammarion en 1993.
Si le mot-clé
de toute cette œuvre est sans doute celui de l’amitié (2), il ne faut pas le
confondre avec « l’âge des copains ». Marc Soriano (3) cite cet
extrait du dialogue engagé entre Bernard
Épin et Jacqueline Cervon 1972 : « Je préfère semer chez les plus jeunes cette graine de l’amitié
véritable, graine qui fleurira peut-être un jour, plus tard, parce que le gosse
aura dans sa mémoire, peut-être, cette chaleur de l’amitié qu’il avait
ressentie, par procuration en quelque sorte, à la lecture d’un livre.»
Si tous ses récits traitent de l’amitié et de la fraternité, toutes
deux possibles selon elle entre des enfants d’ethnies et de cultures
différentes, ils sont, tantôt accessibles aux enfants (en particulier, ceux de
la collection « Dauphine »), tantôt aux pré-adolescents et aux adolescents.
Seuls ces derniers sont capables, par exemple, de comprendre les difficultés
d’adaptation des peuples africains ou orientaux
au monde moderne, fortement occidentalisé, les problèmes de ce qu’on
appelait alors le Tiers Monde et les fortes inégalités sociales.
Bernard Épin note fort justement « quelques grandes constantes caractéristiques :
des personnages venus de milieux et surtout de pays différents, le plus souvent
rencontrés au cours de voyages, ; une volonté de battre en brèche les
exclusions, le racisme, en racontant des histoires où la rencontre, l’échange,
construisent des relations fortes d’amitié et de fraternité ; une écriture
qui tourne le dos au naturalisme, marqués par des schémas narratifs très
charpentés, qui, rejoint, pour le meilleur, la force évocatrice des
contes. » (4)
Dans une lettre adressée à Nic Diament en 1987, Jacqueline Cervon
confesse : « J’écris parce que
j’ai envie d’écrire (…). J’espère ainsi ouvrir mes lecteurs à la connaissance
des autres et faire exploser le cadre de leurs rêves et de leurs réflexions, en
un mot, les amener à se considérer comme les enfants de la planète… » (5)
Dès les
premières publications, les prix récompensent des livres bien écrits, aux
intrigues rigoureuses, à la structure romanesque solide et souvent empreints d’humanisme
et de poésie (6). Ses ouvrages ont été traduits en allemand, italien,
portugais, anglais, iranien, espagnol…
En
ces temps où semble, hélas, revenir en force l’intolérance, le racisme, le
communautarisme et le repli égoïste sur soi, la relecture des livres de
Jacqueline Cervon paraît s’imposer comme un antidote sain et indispensable.
(1)
Claude Bron : Romanciers
choisis pour l’enfance et l’adolescence Editions H. Messelier, Neuchâtel,
1972. (p. 53)
(2)
Lire : L’amitié
dans les romans de Jacqueline Cervon par Bernard Épin, Revue des livres pour enfants, n° 28 et n° 29, juin et septembre
1972 ;
(3)
Marc Soriano : Guide
de littérature pour la jeunesse Delagrave, 2002 (Réédition de l’ouvrage de
1974) (p. 113)
(4)
Bernard Épin : Dictionnaire
du livre de jeunesse. La Littérature d’enfance et de jeunesse en France
sous la direction de Isabelle Nières-Chevrel et Jean Perrot Editions du Cercle
de la Librairie, 2013. (p. 174)
(5)
Nic Diament : Dictionnaire
des écrivains pour la jeunesse (1914-1991)
L’École des loisirs, 1994.
(6)
Pour la liste des prix obtenus, se reporter à la
bibliographie publiée ultérieurement.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire