Coup
de rétro sur les fictions offertes à la jeunesse en 1955 (2)
L’atmosphère de guerre froide favorise l’existence de camps
antagonistes même parmi les personnes chargées de la jeunesse.
Les catholiques qui ont pris l’habitude depuis longtemps, en héritiers
de l’abbé Bethléem et de ses successeurs, de surveiller les lectures juvéniles
et de faire la liste des journaux recommandés et des revues à proscrire
n’évoquent guère eux aussi que les productions qui leur conviennent. Ils sont
aussi ceux qui disposent du plus grand nombre de publications et de collections de livres. Leurs livres
sont en outre très présents dans les « Bibliothèques pour tous », une
appellation abusive puisqu’elles ont été crées pour suivre les conseils et
consignes des disciples et successeurs de l’abbé Bethléem.
Dans
le camp catholique, depuis 1950, Fleurus et Gautier-Languereau publie la
collection « Jean-François »
plutôt destinée aux garçons. A partir de 1953, Fleurus et Mame
s’associent pour lancer la collection "Monique"
(pour les filles). Gautier-Languereau poursuit « La
Bibliothèque de Suzette » et depuis 1955, les éditions belges Gérard de
Verviers ajoutent à la collection « Marabout », la série « Marabout Mademoiselle » où René Philippe
a lancé la série « Sylvie ». T. Trilby, illustrée par Manon Iessel,
s’adresse aussi aux filles dans la collection « Pour les jeunes »
chez Flammarion (Cordon, s’il vous plaît,
Coco de France). L’éditeur belge Desclée de Brouwer destine sa collection
« Belle humeur » aux milieux catholiques.
Depuis 1954, les filles
peuvent encore trouver des bonheurs de lecture dans la collection « Les Sentiers de l'aube » éditée
chez Plon.
Notons au passage que Mame, dans la
collection « Succès de la jeunesse »,
publie depuis 1953 quelques romans de S-F. Gautier-Languereau poursuit « La Bibliothèque de Suzette » (pour les fillettes de 8-10 ans
et plus).
La
Maison de la Bonne Presse dispose alors de moins de moyens que Fleurus.
(La
collection « Bayard », pour les garçons est née en 1954 et l’ancienne
collection des « romans cinématiques » est devenue bien
vieillotte).
Les
éditions Alsatia, bien vues par les catholiques, distinguent « Signe de piste junior », « Signe de piste » et « Rubans noirs » mais les éditions Spes qui ont lancé en 1952
la collection « Jamboree »
diffuse aussi des romans scouts, tandis que Brépols lance « Junior Club ». Desclée de Brouwer
poursuit la collection « Belle
humeur ».
Les communistes encore très importants électoralement (le parti
communiste est toujours le 1er parti de France), disposent de
critiques connus et compétents qui s’intéressent aux lectures de la jeunesse et
en parlent fort bien. Malgré la force qu’ils représentent, ils éditent encore
peu de livres pour la jeunesse. Le problème, c’est non seulement qu’ils
s’avancent masqués, cachent leurs sympathies ou leurs adhésions au Parti
Communiste mais qu’ils privilégient certaines œuvres et en ignorent d’autres.
C’est chez Pierre Horay que paraît d’abord Le Pays où l'on n'arrive jamais d’André Dhôtel.
Les éditions L.I.R.E.,
rares éditions orientées à gauche, ont créé
la collection « Le Roman pour la jeunesse » vers 1954-1955.
En 1955, la fondation des Éditions La
Farandole liées au Parti communiste français donne naissance à plusieurs
collections encore très embryonnaires. On y rencontrera des récits de George
Sand (Le Chêne parlant), Pierre
Gamarra, Bertrand Solet, Charles Vildrac… Il s’agit des collections « Mille épisodes » (pour les 10/14
ans), puis « Jour de fête »
(visant les 10-12 ans), et « Prélude » (pour les plus de 13
ans).
Les
écoles publiques, en plus des éditions Magnard et Nathan, restent fidèles aux
éditions Rageot (en 1955, Tatiana Rageot s’associe à la Librairie Hatier) où
subsiste encore la collection « Heures joyeuses » qui publie Ransome
(Hirondelles et Amazones), M.A. Baudouy et Lipincott. Elles sollicitent encore
les éditions Delagrave pour alimenter leurs bibliothèques. En plus de « La Bibliothèque Juventa » (pour
les 12-15 ans), « La Mouette »
(12-14 ans environ), l’éditeur crée « Gentiane », « Bouton
d'Or » et « Pivoine ».
Depuis 1953, « Aventure et
jeunesse » propose des livres un peu plus attrayants.
Quelques
éditeurs scolaires tentent d’innover. Magnard dont les collections « Bibliothèque Azur » (Pouk et ses loups garous de Léonce Bouliaguet, Kpo la panthère de René Guillot) et « Fauves et jungles » s’essoufflent, crée le prix (remporté
d’abord par Mylord et le saltimbanque
d’Elsie) et la collection « Fantasia »
(dont les premiers titres paraissent en 1955).
Autre éditeur prisé par les enseignants de l’école publique, Sudel (L’Arc-en-ciel de Jeannine, Fan-Lo et Delph le Marin de P.-J. Bonzon, Colin-Bourrelier
crée la nouvelle collection « Alouette »
tout en poursuivent « Marjolaine »
et « Primevère ».
Dans la collection diversifiée « Contes et légendes » (plus
de 70 titres), chez Fernand Nathan, André Bajdaev rassemble les textes du genre
encore peu connus de la Bulgarie (1955) tandis que la série « Contes et Légendes des régions de France »
s’enrichit de volumes concernant la Normandie, la Picardie, Paris et
Montmartre.
Dans le même domaine des contes, chez Hatier-Boivin paraissent les Contes de rubis de Charles Robert Dumas
et Ré et Philippe Soupault rassemblent des Contes
des 5 continents pour Stock. « La Bibliothèque précieuse »,
collection de poche chez Gründ, au
faible prix et aux couvertures agréables. publie deux recueils de contes
d’Andersen dont La Bergère et le Ramoneur.
Flammarion publie Le Chat Jérémie et
autres histoires de chats d’Adrienne Ségur.
Aux Editions de l’Ecureuil, Maurice Percheron développe des Récits mythologiques de l’Inde (1955). Vers
1955, Hatier relance « Les Contes
de toutes les couleurs », vite devenus « Les Nouveaux Contes de toutes les couleurs ».
Précisons que dès 1954, les éditions Nathan publient aussi les albums,
illustrés surtout de photos de Dominique Darbois (alias Dominique Sabret), dans
la collection « Les Enfants du monde ». En 1955, paraît Agossou
le petit Africain.
Les Éditions Gallimard qui ont donné naissance à « La Bibliothèque blanche » en 1953, plus
tard « illustrée »,
brochée puis reliée mais les titres publiés en 1955 sont encore peu
nombreux.
Toujours
en 1950, les éditions Gedalge avaient lancé « Les Loisirs de la jeunesse » (une collection illustrée en couleur), peu à
peu remplacée en 1955 par la collection « La Comète » (voir
plus haut dans ce blog).
On se souvient moins de la collection « France Club », créée en
1954 par Jean Merrien, chez André Bonne, qui publie La Montagne aux chamois de Tony Burnand.
En
mai 1953, les Éditions Gérard avaient créé la collection « Marabout Junior »,
« collection jeune pour tous les âges », bimensuelle puis
hebdomadaire. La locomotive de la collection est, bien sûr, Bob Morane de Henri Vernes qui publie en
1955 Le Secret des Mayas, Le Sultan de
Jarawak, Les Requins d’acier...
Les adolescents lisent aussi depuis 1946,
aux Presses de la cité, les aventures du Captain W.E. Johns, aviateur anglais
de la série « Biggles » avec de futures incursions dans la science-fiction (Retour sur Mars, Vénus contre Terre,
Astropolis).
En plus de « Plaisir des contes » et de la collection
« Le Rameau vert », Casterman innove avec « Relais, série Histoire »
tandis que « Mistral »
réédite des classiques. Dès 1951, la Librairie Gründ lance
« Trésors des jeunes »,
une collection constituée d’énormes volumes reliés. Signalons que pour les plus
jeunes, Pierre Probst (Dandi, Pouf et
Noiraud) et Romain Simon (Contes du
lutin) publient des albums agréablement illustrés.
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