Coup de rétro sur quelques journaux illustrés de
1955
La presse
commerciale et distractive illustrée marque un certain essoufflement pour les
journaux privilégiant la bande dessinée. Marijac a créé Nano et Nanette
en 1955, pour lequel il avait su tirer parti des talents de Edmond-François
Calvo, Erik (René Jolly), Noël Gloesner et Étienne Le Rallic.
Le Journal de
Mickey
renaissant en 1952, a fait appel à des dessinateurs français, comme Pierre
Nicolas, auteur de la longue série Mickey
à travers les siècles (1952-1978). Il atteindra le tirage record, en 1957,
de 633 000 exemplaires.
Hurrah
Magazine est presque exclusivement
constitué de bandes dessinées en couleurs (une seul page de texte :
par exemple, La jeunesse de Catamount
d’Albert Bonneau). Outre Robin des
bois de Jacques Souriau et Renaud Fontenay, Davy Crockett d’Étienne
Le Rallic, Yann, Mousse du
« Goéland » et Arthur et Zoé d’Ernie Bushmiller, on trouve des bandes dessinées
traduites (Duck Hurricane, Chandra,
prince royal…). L’Intrépide dont la 2e série s'étend de
1949 à 1962, après un temps de fusion avec Hurrah, connaît un inexorable
déclin. Aux jours fastes, il publie Horn du West d’Étienne Le Rallic, Fanfan la Tulipe, fidèlement adapté du film de
Christian-Jaque par Jean Prado, et Cadet Rousselle, du
même Étienne Le Rallic.
Le journal Benjamin, renaît de décembre 1952 à novembre
1958, avec le parrainage d’écrivains et d’intellectuels, peu sensibles aux
aventures belliqueuses de Biggles mais davantage séduits par la rareté des bandes
dessinées. Il rend l’actualité accessible aux jeunes lecteurs, une
préoccupation constante chez son créateur Jean Nohain. En revanche, le magazine
Entre amis ne percera pas, vivotant de 1954 à sa mort en mai 1959.
Chez Fleurus,
l’hebdomadaire catholique pour les garçons Cœurs vaillants connaît une année sans
grande surprise avec quelques désillusions. Certes, on rencontre toujours les
personnages de Frédéri le gardian de
Robert Rigot (Le Chevalier Corsaire, Au
pays des Caboclos, Le Gisement de Cavagna), et Yann Levaillant dessiné par Noël Gloesner (Le Chrysanthème de Jade, Expédition Ternium) occupe toujours la Une
mais Oscar et Isidore de F.-A.
Breysse, après une fugace apparition dans Le
Secret du Vultur Totem inachevé, vont disparaître définitivement le 17
avril 1955. La rédaction fait croire que l’auteur est malade et pousse même
l’hypocrisie en lui souhaitant « un prompt rétablissement » alors que
cette rédaction, dans une ingratitude totale, l’avait mis dans l’obligation de
s’en aller.
Les pages
centrales sont alors remplies en catastrophe par des bandes de Robert Moreau,
Pierdec, Pierre Brochard et même par Pellos qui illustre des histoires
illustrées tirées du Mutilé de l’Océan
de Jean Merrien et de Moby Dick de
Melville. Rochelle, dans un style qui semble ne rien devoir à celui de Rol)
dessine plusieurs récits complets en changeant de style. Alors que Robert
Moreau, très sollicité, essaie de faire oublier l’absence de Calvo, Erik (André
René jolly), toujours égal à lui-même, intervient très souvent. On lui doit les
bandes Le Maître des profondeurs, Le
Commissaire Picablo contre Z, Sus aux pirates et surtout Pat’ Rac contre l’Anguille, avant que le
reporter-détective revienne dans Échec au
dragon.
Dans son style réaliste,
G.B. Baray réalise Le Secret de l’amphore
et Alain d’Orange illustre quelques scénarios. Notons encore le départ pour
Rome de l’abbé Gaston Courtois qui va ainsi laisser le champ libre à l’abbé
Jean Pihan.
Vaillant, hebdomadaire soutenu par
le parti communiste qui affirme toujours être « le plus bel illustré de la
jeunesse », avec un tirage honorable, bénéficie de séries prestigieuses.
Malheureusement, en 1955, la fantastique bande dessinée de
science-fiction : Les Pionniers de l’Espérance, dessinée par Raymond Poïvet sur un scénario de Roger Lecureux est
absente. Mais Lecureux scénarise Lynx
blanc et L’Insaisissable Nasdine
Hodja. En revanche, on peut lire P’tit
Joc de André Joy (alias
Gaudelette) et Jean Ollivier, Bob Mallard de Rémi Bourlès et
Bourdens. Ajoutons, remarquablement dessinées par René Bastard, la bande Yves
le Loup (sur scénario de
Jean Ollivier) dans Le Testament de
Gauvin et Le Manoir des ogres.
Des adeptes passionnés de comique dévorent Placid et Muzo, l’ours et le renard conçus par Jean Ollivier
et dessinés dès 1946, Pif
le Chien, créé par
le même Arnal et repris par Mas, Arthur le Fantôme de Cézard et La Pension Radicelle d’Eugène
Gire, cocasse et délirante, bien mise en valeur par les pages grand format. Citons
encore Lucien Nortier, l’auteur de Sam Billie Bill. En 1955 apparaît Ragnar le Viking de E. T. Coelho dans La Harpe d’or. N’oublions pas Capitaine Cormoran de Paul Gillon
superbement mis en couleur et Louk, Chien
loup.
La presse
d’origine belge connaît une embellie remarquable surtout à travers les
deux journaux symbolisant les écoles de Bruxelles et de Charleroi. Chez Dupuis,
le journal de Spirou dont le rédacteur en chef est Yves Delporte
bénéficie de progrès techniques dans l’impression. On y trouve des séries
mémorables. Pour Lucky Luke,
Morris a pour scénariste Goscinny quand il dessine Des rails sur la prairie.
Aux histoires de Buck Danny, l’aviateur dessiné par Victor Hubinon et
scénarisé par Charlier s’ajoute une superbe biographie de Mermoz. Tif et
Tondu contre la main blanche de
Will et Rosy poursuivent leurs aventures dans Le Retour de Choc. Spirou, mis entre les mains du génial André Franquin (quoi va quitter Spirou
pour Tintin) affronte Les Pirates du silence. Les
Belles Histoires de l’Oncle Paul lancées par Charlier pour le côté éducatif
font taire les censeurs. Peyo envoie Johan vers La Pierre de Lune juste avant Le
serment des Vikings. Sirius (Max Mayeu), censuré pour L'Épervier bleu
sur la Lune, commence la superbe série de Timour (Le Talisman). Il
aborde ainsi l’Histoire depuis l’Antiquité à travers les générations
successives du jeune homme aux longs cheveux roux. Jerry Spring, superbe western de Jijé, lancé en 1954
se poursuit avec Le Visage pâle et La Passe des Indiens. N’oublions pas Kim Devil de Gérald Forton dans Le Monde disparu. Les amateurs de
scoutisme découvrent La Patrouille des Castors de MiTacq et Charlier
dans Le Disparu de Ker Aven, tandis
que naît, en novembre, l’étonnant journal Risque-Tout durant le temps de
50 numéros avec un superbe grand format. C’est assez pour que Maurice Tillieux
crée Marc Jaguar.
Le journal de Tintin
aligne lui aussi depuis ses débuts des séries prestigieuses. A Tintin et Milou,
engagés dans L’Affaire Tournesol,
Hergé ajoute Jo, Zette et Jocko qui s’aventures dans La Vallées des cobras. Le jeune
breton Corentin de Paul Cuvelier
a laissé un grand souvenir car personne n’a su comme Cuvelier dessiner les
« Peaux Rouges » avec autant de finesse, de respect et
d’exactitude... Alix l'intrépide de Jacques Martin et dont les aventures
s’étendront surtout sur le pourtour de la Méditerranée, découvre La Tiare d’Oribal. Bob et Bobette
de Willy Vandersteen, après Le
Gladiateur-Mystère affrontent les
Martiens. Blake et Mortimer (conçus par Edgar-P. Jacobs dès 1946)
plongés dans L’Énigme de L’Atlantide. Superbe série
animalière, Chlorophylle né sous le crayon magique de Raymond Macherot
lutte contre les rats noirs. Franquin
fait une infidélité à Spirou en
créant chez son concurrent Tintin le
duo hilarant de Modeste et Pompon. Il
faudrait encore citer Les Aventures de
Dan Cooper de Weinberg, Le Chevalier
Blanc de Fred Funcken, Les Nouvelles aventures de Pom et Teddy
de Craenhals, les récits complets en B.D. et les 8 pages de
« Tintin-Actualités ».
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