La collection "Heures joyeuses" des Editions Rageot
(1)
Voici un nouveau chapitre, en trois parties, relatif au "Cercle des collections disparues" du rayon jeunesse.
C’est
surtout grâce à un article fouillé et très bien documenté de Jean-Claude Le
Dro, intitulé : Georges et Tatiana Tageot : les débuts
des éditions de l’Amitié-GT Rageot, que nous connaissions mieux la
collection « Heures joyeuses ». Cet article est paru en 2007 dans les
pages 211-224 du numéro 21 de l’excellente revue Cahiers Robinson, imprimé sur les Presses de l’Université
d’Artois.
Polyglotte
et traductrice, Tatiana Rageot, fille du philosophe russe Léon Chestov, et son
mari Georges (1901-1950), ancien directeur commercial chez Hachette, prisonnier
en 1939, libéré en 1941, avaient d’abord créé la collection "Heures joyeuses" pour la jeunesse,
chez Aubier en 1934.
Le
couple fonde en 1941 la S.A .R.L. des Editions de l'Amitié-G.T.
Rageot et reprend la collection "Heures
joyeuses", en récupérant les invendus des quelques titres parus chez Aubier.
Si tous les livres ont le même format (18*11,5 cm), en revanche la pagination
est très variable (de 160 à 351 pages).
Les premiers livres publiés à partir de 1942 sont surtout des récits de
l’auteur anglais Arthur Ransome et d’auteurs allemands, comme Karl Oppel, Max
Mezger, Fritz Steuben et D F. Weinland, G.-A. Ihering (Le Trio de St-Florian), H. Queling (En route pour l’Himalaya).
L’ouvrage qui porte officiellement le numéro
1 : La Mouette des mers de T-H. Johansen est d’origine norvégienne. C’est
le plus fort tirage de la collection : 43 030 exemplaires. Il raconte
« l’aventureuse campagne de pêche d’un mousse norvégien », au
Groenland et au Canada.
Des
auteurs allemands, en particulier Fritz Steuben
Dès
1942, on remarque donc plusieurs récits traduits de l’allemand. D’abord, Le Capitaine Magon de Karl Oppel (datant
de 1926 et qui s’appuie, avec plus ou moins de vraisemblance, sur le périple du
Carthaginois Hanon. Notons qu’en 1975 était déjà paru en France : Les Aventures du Capitaine Magon ou une
exploration phénicienne mille ans avant l’ère chrétienne de Léon Cahun).
Monique à Madagascar de Max Mezger, écrit en
Allemagne en 1931, dans le fond Aubier
en 1935, reparaît en 1942. Le livre raconte surtout comment une fillette
découvre la grande île de l’Océan Indien, en compagnie du jeune malgache
Bévava.
Sont
aussi parus plusieurs autres récits traduits de l’allemand. Rulaman de F. Weinland (en fait, David
Friedrich Weinland) est un récit préhistorique évoquant les tribus qui
habitaient « de sombres cavernes, perdues au sein d’immenses
forêts », près du lac de Constance. On prédit à Rulaman, fils de Rul, chef
d’une tribu des Aïmates, qu’il deviendra un chef tout-puissant. Or, un sort
tragique l’attend et les tribus seront attaquées par des envahisseurs, les
Celtes, techniquement plus avancés dans la fabrication des outils et des
armes
Les exploits du chef
indien Tecumseh
L’auteur
le plus traduit est Fritz Steuben (alias Erhard Wittek), un auteur qui, selon
J.-C. Le Dro, aurait d’abord « écrit sous l’influence de l’idéologie
nationale-socialiste ». Sur huit volumes dont sept volumes ont été
traduits dans la collection, racontent les aventures indiennes du chef indien
Tecumseh. L’auteur a illustré lui-même quatre volumes.
« Grand
chasseur, guerrier invincible et orateur admiré », il devient
Flèche volante (1942) dans un premier
récit qui évoque le premier combat, le premier scalp et l’existence quotidienne
de l’adolescent hardi. Le volume suivant : Pieds-Agiles et Fille-à-L’Arc (1943) s’attarde surtout sur
« les jeux et téméraires exploits d’une bande turbulents gamins dans une
village d’Indiens Shawanos ». Dans Ouragan
rouge (1943), « un récit de la première guerre des Indiens pour l’Ohio
raconté par d’anciens documents », le personnage principal est Cornstalk
(représenté en couverture), le chef suprême des Indiens Shawanos, lesquels
Indiens luttent contre les Blancs, envahisseurs de leur patrie.
Dans Tecumseh le puma (1946), alias Flèche
Volante, le chef de guerre des Shawanos est devenu « maître de l’ordre des
chiens », l’association secrète des jeunes guerriers de sa tribu. Il veut
reconquérir le Kentucky et obtenir un traité.
Paraîtront
encore Etoile rayonnante (1946) (quand
Tecumseh invoque Nanabozho, dieu du soleil et protecteur des chasseurs rouges) et en deux tomes, en 1951, Le Fils du manitou. Le volume concernant La Mort de Tecumseh n’est pas paru.
Il
est évident que les livres de l’Allemand Fritz Steuben, racontant la vie de
Tecumseh, sont beaucoup moins connus en France que ceux de l’Allemand Karl May,
narrant les exploits de Winnetou.
Un auteur anglais fort justement
privilégié : Arthur Ransome
Arthur
Ransome (1884-1967) est présent avec sept titres, traduits et publiés de 1945 à
1951. Hirondelles et amazones (Swallows
and Amazons, traduit chez Aubier en 1935, repris en 1945), premier roman
d’une série de douze, certains n’étant pas traduits, n'évoque guère par son
titre le campement sur une île déserte, et Le Vallon des hirondelles. En
fait, « Hirondelles » est le nom du bateau des enfants
Walker : Jean, Suzanne, Micky et Roger (John, Susan, Titty et Roger dans
la version originales) et les « Amazones », ce sont Marion et Margot
Blackett (Nancy et Peggy Blackett dans la version originale). Ces enfants de
sept à treize ans qui, se font d’abord la guerre avant de sceller une alliance
durable, vivent des vacances joyeuses et mouvementées, en pilotant des bateaux
à voile sur un lac anglais et en faisant du camping sur une île. C’est un des
plus fort tirages de la collection : 41 000 exemplaires.
Le Vallon des Hirondelles (1946, quand les « Hirondelles » passent
du statut de navigateurs à celui d’explorateurs), comme l’ouvrage
précédent, est illustré par Clifford
Webb, tandis que tous les autres récits seront illustrés par Arthur Ransome
lui-même.
Hirondelles dans la neige (1946) évoquant de mémorables vacances de Noël,
précède Le Trésor de Peter Duck (1947),
quand « Hirondelles » et « Amazones » sont à la recherche
d’un trésor dans les mers du Sud. Ce
récit est publié la même année que Le
Club des Foulques. Au début du récit, Dorothée Callum et son frère cadet
Dick font la connaissance d’un garçon aux connaissances étonnantes : Tom
Dudgeon A bord du yacht le « Chardon », Tom, le hors-la-loi, fuit ses
persécuteurs, les Hurluberlus, à travers rivières et canaux du Norfolf.
Dans Pigeons voyageurs et chercheurs d'or (datant de 1936, traduit en 1949), « Hirondelles » et
« Amazones » sont rejointes par Dorothée Callum et son frère cadet
Dick, dans la région des lacs. Un vieux
tunnel s’effondre et un incendie menace de ravager la lande…
Dernier
récit publié en 1951, Nous ne voulions
pas aller en mer est un fort volume de 325 p. On peut s’étonner que les
traductions des ouvrages d’Arthur Ransome ne soient pas plus nombreuses en
France.
Les premiers auteurs
français publiés
André
Noël, connu surtout pour ses romans scouts et, plus tard, pour quelques récits
historiques, figure parmi les premiers auteurs français publiés. Après Châteaux en Auvergne (1944, deux chefs
scouts doivent gagner leur brevet d’explorateur mais se heurtent à « un
redoutable secret »), il propose Aux
bois peureux (quand deux scouts
aident une petite paysanne à ramener la paix dans sa famille) et Patrouilles dans la nuit (1945) : « un périlleux camp scout en Auvergne » raconté dans son journal
par le second des « Léopard », Milou, juste avant Les Compagnons de la feuille blanche.
« pathétique histoire d’un apprenti papetier au pays d’Ambert ».
André
Noël est aussi l’auteur de romans historiques comme L’Or de Delphes (souvent réédité : le jeune Ibar combat à
Alésia aux côtés de Vercingétorix), et La
Route de César. Les deux récits sont réunis en un seul volume en 1950.
Notons encore, du même auteur, Le Pays du
roi captif (1946, deux écoliers
parisiens s’embarquent à bord de
l’« El Dorado »).
Côté français, citons aussi Abeille d’Anatole France en 1942 (une histoire féerique, rare chez
cet écrivain) et plusieurs récits régionaux et
folkloriques d’Alix de La Chapelle-d'Apchier, tels que Les Soirs de la Montagnère (1943) et Les
Nouveaux contes de la Montagnère en 1944, des vieux contes
populaires d'Auvergne (poursuivies plus tard dans Un vent sauvage souffle sur la montagne).
Outre
la réédition de Salammbô de Flaubert, narrant la lutte de la grande cité
phocéenne, Carthage, contre ses mercenaires, on note Sur les traces du « Pourquoi-Pas » de
Geneviève Dardel, ou l'aventure de Charcot au Grand Nord revécue par quatre
garçons… Maurice Boissais campe son récit sur fond de terroir lorrain,
avec A l’ombre du mirabellier.
Entre
1944 et 1947, il faut encore signaler la parution de Fanch Lagadec tambour de la République (1944, l’épopée
révolutionnaire d’un jeune breton) de Charles Chassé, Robert le diable de Thierry Sandre (1945, une légende médiévale), Andice et Guillot (1946, histoire
berrichonne du temps des châteaux-forts) d’Hélène Schutzenberger, Le Château des douze peupliers (1946)
d’Hélène Badan (une jeune française séjourne dans un château de Pologne), Les Cloches de Bruges (1947) de M.
Doumerc (Joris, fils d’un drapier brugeois, suit son père à Venise), Herbedouce (1947) d’André Michel et Casse-Noisette (1947) d’Alexandre
Dumas.
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