Jany Saint-Marcoux (1920-2002), romancière appréciée
des jeunes filles
Jany Saint-Marcoux
(1920-2002) est une romancière dont les principales œuvres destinées aux jeunes
filles sont parues aux Editions G.P. de Paris entre 1952 et 1973.
Après
avoir été journaliste dans un grand quotidien de province, Jany Saint-Marcoux
publie dans la « Bibliothèque Rouge et Or » un premier roman, La Duchesse en pantoufles dont l’action se
situe dans la baie du Mont Saint-Michel où l’auteur a vécu sa petite enfance.
Encouragée
par un premier succès, elle va pendant une vingtaine d’années gratifier les « Bibliothèque
Rouge et Or » puis « Souveraine » (à partir de 1957) de 26
récits qui font d’elle la locomotive et le solide pilier des Editions G.P. Le récit Pour
qu’un cœur batte encore qui traite en 1969 du grave problème des dons
d’organe et de la transplantation cardiaque est publié dans la collection
« Olympic », toujours chez G.P.
Elle
épouse en 1958, le romancier Jean Sabran qui, sous le pseudonyme de Paul
Berna, est depuis longtemps un autre
pilier des mêmes éditions. Toutefois, tandis que Paul Berna introduit les
milieux populaires et ouvriers dans ses récits, Saint-Marcoux choisit plutôt
ses héroïnes dans les classes moyennes, voire bourgeoises ou d’origine
aristocratique. Elle évoque tout de même des activités agricoles ou d’élevage
et l’exploitation des algues.
Les
lieux de l’action sont variés et permettent parfois de valoriser plus ou moins
un site ou une région : La baie du Mont Saint-Michel (La Duchesse en pantoufles), L’Alsace et les environs du
Haut-Koenigsbourg (Les Sept filles du roi
Xavier), le Périgord, la Dordogne et la ville de Brantôme (Domino Le Secret de Pierres-Noires), le
pays basque (Le Voleur de lumière),
la Provence (Aélys et la cabre d’or),
Toulouse (La Caravelle).
Toutefois,
Paris et ses environs sont des lieux privilégiés : Montmartre (Fanchette), l’île Saint-Louis (Les Chaussons verts), la Place des
Vosges (Le Diable doux), Paris et l’île de la Grande-Jatte (Espoir en 33 tours), le quartier parisien
du Marais (Criss ou j’étais une idole),
Paris et la Provence (Un si joli petit
théâtre), Paris, sa banlieue et ses grands ensembles (Mon village au bord du ciel). Paris est encore choisi pour les deux
épisodes de Corinne.
Les
îles offrent aussi un cadre de choix. Outre
les îles parisiennes de Saint-Louis et de la Grande-Jatte, on découvre en
Bretagne, l’île de Sein (Le Château
d’algues), l’île de Ré (Cet été-là…)
et au bord de la Méditerranée, l’île de Porquerolles (Le Jardin sous la mer) sans oublier les îles Baléares (Le Château des Baléares).
On
sort de l’Hexagone pour la Tunisie (Princesse
Cactus), Venise et l’Italie (L’Oubliée
de Venise), l’Espagne et L’Alhambra de Grenade (La Guitare andalouse), L’Espagne et l’Italie, Séville, Rome et
Milan (Aniella), (Le Mexique et la
civilisation maya du Yucatan (La
Princesse endormie).
Le
pittoresque de certains lieux ne doit
pas cacher le fait que Saint-Marcoux ancre ses récits dans un cadre réaliste et
qu’elle aborde des sujets d’actualité parfois graves : rééducation des
grands handicapés (Le Voleur de lumière),
création des villages d’enfants (L’Oubliée
de Venise), l’alcoolisme du père et la possible guérison (Aniella), l’emprisonnement du père (Cet été-là), la vie dans les grands
ensembles (Mon village au bord du ciel).
Cette entrée dans la modernité se confirme avec le récit très documenté sur la
construction de La Caravelle par
Sud-Aviation. La recherche sous-marine sous-tend l’intérêt du roman Un jardin sous la mer.
En
1972, Jany Saint-Marcoux passe de l’écriture de romans à la direction de
collections, d’abord chez Hachette (ce qui facilite la nouvelle édition de
trois de ses récits dans la collection « Idéal Bibliothèque », rivale
de la « Bibliothèque Rouge &t Or », puis chez Tallandier en 1976.
On
oublié aujourd’hui l’immense succès de ces romans solidement construits, à la
fois dramatiques, sentimentaux et communiquant un amour de la vie. Ils sont écrits
lors de la meilleure période de ce que Jean Fourastié a appelé « Les Trente
Glorieuses », une période où l’on salue d’autant mieux les progrès
économiques, techniques et scientifiques que les guerres (en Indochine ou en
Algérie) sont occultées ou franchement
ignorées par l’ensemble de la population.
Certes,
Saint-Marcoux utilise ses talents de journaliste soucieuse d’une documentation
irréprochable au service de sa création, mais la France et la société qu’elle
décrit est globalement conservatrice surtout dans la représentation de l’épouse
et de la mère de famille (quand elle est encore en vie…).
C’est
dans les récits présentant les vocations artistiques que les jeunes filles
semblent disposer de plus de liberté et d’invention créatrice, même si
Saint-Marcoux assurait qu’elle voulait démythifier les milieux séduisants et
prestigieux de la danse, du chant et du spectacle. On ne sait si, à l’égard de
ce monde, elle cède à la fascination ou à une certaine réserve prudente.
Espoir en 33 tours raconte à la fois
l’ascension artistique de Sylvie Duriel, élève du conservatoire, pianiste
virtuose des « Préludes » de Liszt, ce qui lui vaudra
l’enregistrement d’un microsillon 33 tours et celle de son ami, l’adolescent
Joël, un as de la trompette de jazz. ((D’où la parution deux jaquettes pour ce
roman, l’une avec Sylvie, l’autre avec Joël).
Mais
peut-être en raison d’une sorte de puritanisme chrétien et d’une époque encore
pudibonde et timorée (nous sommes en 1960), l’élan des cœurs ne se concrétise
pas dans l’élan des corps et c’est sans doute ce qui surprendrait le plus les
lectrices d’aujourd’hui. Le plus petit contact physique semble exclu.
Dès
1993, Nic Diament ajoute une autre raison au vieillissement de ces
récits : « Leur ancrage dans la
réalité des années soixante, qui a été une raison de leur succès, les date
inexorablement, et leur sentimentalité appuyée en plaît plus aux lecteurs
actuels. » écrit-elle dans son « Dictionnaire des écrivains
français pour la jeunesse, 1914-1991 »
Criss ou j’étais une idole (réédité en
1973, chez Hachette sous le titre Le
Temps d’une chanson) décrit admirablement et techniquement la
« fabrication accélérée dune idole des jeunes. Heureusement, la chanteuse
Christelle, au-delà du tourbillon de « triomphes mouvementés » saura
raison garder et comprendre qu’une carrière se construit lentement et
difficilement.
Corinne qui voulait aller danser
s’engage effectivement dans une carrière de danseuse et Corinne et son prince doivent apprendre que le bonheur ne se
confond pas avec la gloire. Marie-Bé réussit des débuts convaincants dans Un si joli petit théâtre et déjà dans Les Chaussons verts, Michèle commence
une ascension de future étoile de la danse, de ballerine… mais elle renonce à
sa carrière. Dans Le
Diable doux, c’est à un studio de cinéma qu’accède la pétulante Tichou qui
tourne un film « sous la direction
du célèbre metteur en scène Bartruc ».
Les
romans de Saint-Marcoux ont été traduits en de nombreuses langues.
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