lundi 18 juin 2018

Bourrelier, collection "L'Alouette" et Colin-Bourrelier


L’éditeur Bourrelier,  "L'Alouette" et Colin-Bourrelier (2)

Une collection soignée, reliée et illustrée en couleurs : "L'Alouette"

Les éditions Bourrelier passent des noms de fleurs à celui d’un oiseau En 1956, elles nomment"L'Alouette", une collection solidement reliée et  illustrée en couleur, pour les 8/14 ans. C’est encore la « collection des "Prix Jeunesse" » (prix fondé, rappelons-le, par Michel Bourrelier) et c’est aussi une collection conçue pour la distribution des prix. Elle  publie donc, en 1956, après Dorothée de Rachel Field, traduite par Natha Caputo, Le Secret de don Tiburcio (celui d’un extraordinaire perroquet bleu), de Jeanne Loisy, Prix Jeunesse en 1956, avec des illustrations de Françoise Estachy,, le même prix ayant été remporté en 1947 par Jean Bosshard pour Le Marchand de sable attendra... (naïvement illustré par J. A. Cante, réédité en 1958). Toujours en 1956 reparaît L’Île rose de Charles Vildrac, bien illustrée en couleur par Romain Simon qui illustre aussi la réédition de La Colonie en 1957 (mais c’est J.A. Cante qui se chargera des rééditions de Amadou le bouquillon et Les Lunettes du lion…), l’année où Marie Colmont (1895-1938) propose son recueil, Le Cygne rouge et autres contes du wigwam et de la prairie,


Des trois titres publiés par May d’Alençon, retenons surtout Les Six garnements de la Roche-aux-chouettes (1957), illustré par Pierre Belvès. En 1958, alors que Georges Nigremont, illustré par Pierre Noël, évoque Quatre coups espacés, c’est Étienne Cattin, amoureux des trains et spécialiste des récits ferroviaires qui est distingué pour Rat-Blanc et son chauffeur. (4 ans avant que soit édité L’Express du soir, 1962, illustré par André Pec). C’est juste avant l’histoire des jumeaux malouins Alain et Alban embarqués sur le bateau de Duguay-Trouin, l’un comme mousse, l’autre en fraude et contraints tour à tour de jouer « L’Autre » chez les corsaires de Simone Martin-Chauffier, un roman primé en 1959 et réédité chez G.P. en 1977. Vingt titres sont proposés en 1960, quand Gine Victor Leclerc reçoit le Prix Jeunesse pour Va comme le vent, les aventures d’un jeune cavalier mongol. Parmi les traductions, on relève en 1957, L’Arc-en-ciel vogue vers Masagara de Friedrich Feld (illustré par Pierre Noël) et Marycia, la princesse au cœur de glace et autres contes polonais de Corneille Makuszynski (1884-1954), finement illustré par Françoise Estachy et, en 1960, En « gnomobile » à travers l’Amérique d’Upton Sinclair. D’André Chamson (1900-1983) on réédite en 1961, L’Auberge de l’abîme, beau roman historique de 1933, évoquant les paysans huguenots pacifistes des Cévennes au XIXe siècle et la traque d’un jeune officier secouru par un médecin amical.



Des éditions Bourrelier aux éditions Colin-Bourrelier
 
Bien qu’il édite encore le Prix Jeunesse 1962 : Le Mystère de l’ancre coralline de Magda Contino, des aventures policières, tout à tour dramatiques et comiques, Bourrelier ralentit la publication d’inédits et rejoint Armand Colin en 1963. L’association Colin-Bourrelier ne surprend pas ceux qui se souviennent que Michel Bourrelier est le petit-fils de Louis Le Corbeiller, cofondateur de la Librairie Armand Colin, ce même Armand Colin ayant initié au métier Michel Bourrelier  qui concentre désormais ses anciennes collections, pour un dernier feu d'artifice, à l'intérieur de l’unique "Marjolaine" qui se décline selon trois niveaux d'âge.
"Marjolaine", "Primevère" et "L’Alouette" cessent de paraître en 1968.
Michel Bourrelier publie ses derniers Prix jeunesse, avant de passer le relais aux Éditions de l’Amitié- G.T. Rageot en 1968. Paraissent, en 1963, Renard roux, de May d’Alençon, en 1964, Sur la route des bohémiens de Jacqueline Verly, en 1965, Le Secret du ballon jaune de Nicole Lesueur, chant du cygne de la collection. Les plus de 12 ans retrouvent, outre des traductions de Dickens et d’Alberto Manzi, des romans de Marianne Monestier (La Petite fille de nulle part… de 1941), ou de Robert Teldy-Naim (Sept soleils sur la neige, 1954, évoquant les prospecteurs du Grand Nord canadien), ou découvrent en 1961, L’Aventure du serpent à plumes, énigme passionnante de Pierre Gamarra, faisant intervenir deux enfants basques, les Aztèques et un mystérieux écrivain. Citons encore L'Express du soir, évoqué par ce fou des trains que fut Étienne Cattin (Prix Jean Macé 1962), et Jeunes princes captifs : Deux fils de François 1er prisonniers en Castille, publié en 1961 par Louis Delluc (un homonyme du cinéaste).







L'éditeur Bourrelier et ses collections pour la jeunesse


L’éditeur Bourrelier, ses collections et le lancement du Prix Jeunesse (1)

C’est en 1932 que Michel Bourrelier (1900-1983), un an après avoir fondé les éditions Bourrelier, ouverte aux ouvrages scolaires et aux innovations pédagogiques, crée deux collections de récits pour la jeunesse. La collection "Primevère" vise les 10-14 ans tandis que "Marjolaine" s’adresse plutôt aux garçons et filles de 8 à 12 ans.

Dès les années 1932-33 est prise la décision de fonder un Prix Jeunesse, attribué sur manuscrit, par Paul Hazard (1878-1944), historien des Lettres renommé, lequel vient de publier en 1932, chez Flammarion : Les Livres, les Enfants et les Hommes. S’associent au projet l'écrivain Charles Vildrac et Michel Bourrelier, l’éditeur publiant, dans les collections "Primevère", "Marjolaine" et "L'Alouette", les Prix Jeunesse jusqu’en 1965, tous deux s'étant montrés sensibles aux suggestions des bibliothécaires Marguerite Gruny et Mathilde Leriche.
En 1945, alors que la nouvelle association « Pour le livre » rassemble des éditeurs dont Tatiana Rageot et Michel Bourrelier, les Bibliothèques centrales de prêt sont créées dans les départements.

La collection documentaire "La Joie de connaître"


Bourrelier publie sa collection documentaire  "La Joie de connaître" de 1935 à 1958. Comme souvent avec les ouvrages de ce type, la documentation devient vite obsolète malgré le prestige de certains auteurs comme Albert Dauzat (Voyage à travers les mots), André Leroi-Gourhan (Les Hommes de la Préhistoire), Alfred Métraux (Les Peaux-Rouges de l’Amérique du Sud), Pierre de Latil (Les Bêtes innombrables des mers) ou Henri Lhôte (Le Sahara, désert mystérieux). Néanmoins les deux tomes de Au village de France de P.L. Menon et R. Lecotté demeurent de précieux ouvrages sur les usages et coutumes de France. La présentation sévère et le contenu parfois ardu conduiront plutôt la collection vers les lecteurs adultes   

L’éditeur lance sa collection "Heures enchantées" (1946-1956) dont on retiendra deux recueils. En 1946, celui des contes d’Aquitaine ;  Étoile d'or et oreilles d'âne et autres contes d’Aquitaine recueillis par Armand Got (déjà connu grâce à son recueil La Poèmeraie de 1928), pour Le Roi des Corbeaux, et en 1948, Le Petit ours en pain d’épice et autres contes de Pernette Chaponnière. Bourrelier traduit en 1946 l’album de Claire Huchet : Les Cinq frères chinois, illustré depuis 1938 par Kurt Wiese. (p 130)
On raconte (Bourrelier, 1956) est un remarquable recueil de 53 contes de Mathilde Leriche (1900-2000), publiant, par exemple, Les Babouches de Baba-Rayou ou Dodu-Dodo le cochon fatigué.

La collection "Marjolaine" pour les plus jeunes

Editant dès 1932 La Mère Grimuzot raconte de Lily Jean-Javal, la collection "Marjolaine", d’abord modeste en titres, aura pourtant une belle longévité puisqu'elle existe encore au début des années 60. Son plus grand succès est sans doute La Maison des petits bonheurs, écrit par Colette Vivier, Prix Jeunesse 1939, et publié en 1940. Il est sous-titré Le Journal d’Aline : une fillette y relate jour après jour le menu quotidien de son univers enfantin.
La collection "Marjolaine" propose 27 titres en 1960, pour les plus de 8 ans. Jusqu’à 10 ans, on propose Le Cirque des merveilles de Jean Buzançais, Nic et Nick de Claire Audrix et Christian Fontugne, Prix jeunesse 1955 et l’explicite : On demande une maman par Colin Shepherd, datant déjà de 1933.
On trouve aussi dans "Marjolaine", en 1952, une traduction de Petit Point et ses amis d’Erich Kästner et, en 1954, Les Lunettes du lion, suivi de La Famille Moineau, déjà écrit par Charles Vildrac en 1932 (illustré par J.-A. Cante), un an avant qu’on réédite La Colonie de 1930, L'Escabeau volant (1935) de César Santelli, et La Maison des petits bonheurs de Colette Vivier (1939). Des titres postérieurs à la guerre, on retient  Thérèse et le jardin d’Alice Piguet (1945), Amadou le bouquillon de Charles Vildrac (1949) et, en 1952, Moudaïna ou deux enfants au cœur de l’Afrique d’Andrée Clair (de son vrai nom Renée Jung, née en 1916), une histoire respectueuse des mœurs de l’Afrique dans laquelle une petite fille blanche transplantée sur les bords de l’Ogoué se lie d’amitié avec un enfant noir sympathique, éveillé et avide de s’instruire. (Les suites, Tchinda, la petite sœur de Moudaïna, paraît chez Bourrelier, en 1959, comme Rejoignons Moudaïna en 1961). On y lit aussi une histoire de maison hantée, Rémi et le fantôme de Colette Vivier, Petit point et ses amis (un peu moralisant), illustré par Jacques Touchet, de l’Allemand Erich Kaestner et L’Étrange famille de la pampa (1957), bon récit d’Aimée Collonges.    


La catégorie des 10-12 ans bénéficie surtout de la trilogie des Moudaïna d’Andrée Clair, romancière éprise des civilisations africaines. La collection avait accueilli quelques nouveaux noms dont ceux de Paul-Jacques Bonzon (Du gui pour Chrismas, 1953) et George Cory-Franklin, déjà célèbre pour ses récits animaliers et sur l’Ouest américain, qui publie L’Ourse grise des Montagnes Rocheuses. Citons encore Jeanne Loisy pour Pim et les cavernes de Coscoron et la Provençale Marie Mauron contant La Ségurane aux retours enchantés.


La collection "Primevère" pour les 10-14 ans
Après avoir publié des traductions d’Andersen (Pierrot la Veine), de R.M. Ballantyne (Terre de glace), la collection "Primevère" s’attache surtout aux  auteurs français.  Elle   publie en 1934  Quatre du cours moyen ou les joyeux gangsters de la Mardondon de Léonce Bourliaguet (1895-1965) et, en 1937, Jeantou, le maçon creusois de Georges Nigremont (alias Léa Pelletier, 1885-1971), un récit très documenté sur la vie rude des ouvriers creusois contraints de migrer vers Paris pour trouver du travail.
Les illustrations de couverture des premières éditions sans jaquette sont souvent dues à Maggie Salcedo. 
Marie Colmont reçoit le Prix Jeunesse en 1935 pour Le Rossignol des neiges, préfacé par Paul Hazard. Il s’agit du parcours courageux, semé d’embûches d’une enfant fugueuse à la voix merveilleuse qui connaît le succès grâce à un travail acharné.  
Si les récits de Lily Jean-Javal et de Lucie Delarue-Mardrus ont beaucoup vieilli, on peut encore apprécier ceux de Léone Mahler (L’Imagier de la Reine, Le Secret de l’île d’Or, La Fileuse de Lune) et de Paul-Jacques Bonzon (Loutsi-Chien et ses jeunes maîtres). 

 
En 1952, "Primevère" reliée, illustrée, pourvue d’une jaquette, et qui s’adresse toujours aux 10-14 ans. édite encore Quatre du cours moyen (ou les joyeux gangsters de la Mardondon) illustré par l’auteur Léonce Bourliaguet (un récit datant de 1934), Le Rossignol des neiges de Marie Colmont, primé en 1935, L'Auberge de la Belle-Etoile (Marcelle Vigneron) de 1936, Jeantou le maçon creusois (G. Nigremont) de 1937 et La Petite fille de nulle part publié par Marianne Monestier en 1941.
Parmi les rares titres nés il y a moins de 5 ans, on relève : Le Secret de l’île d'or dû à Léone Mahler en 1948, Les Etranges voyageurs de Georges Nigremont (1949) et Sama, Prince des éléphants de René Guillot, publié en 1950.