lundi 27 novembre 2017

1957 Monjoie ! Saint-Denis, un récit conventionnel de Louis Saurel

1957 Deux romans historiques : Colin Lantier de Jean OLLIVIER et Montjoie ! Saint Denis ! de Louis SAUREL

II Montjoie ! Saint-Denis de Louis Saurel, un récit conventionnel trop étalé dans le temps

Le roman de Louis Saurel est bien différent de celui de Jean Ollivier, malgré certains points communs.
L’action s’étire de 1415, année du désastre d’Azincourt, à 1429 lorsque la Lorraine Jeanne délivre Orléans. 


Vincent de Chauvigny, comme Colin Lantier, est un jeune homme d’une quinzaine d’années « de bonne taille, svelte, au corps souple, nerveux et déjà musclé ». Orphelin de père mais déjà écuyer, il est élevé par le seigneur François de Villiers, dans son château de Montfort, au sud d’Auxerre. Parfait cavalier, bon escrimeur, tenace et courageux, Vincent de Chauvigny se montre habile au jeu viril de la quintaine.


Mais le pays est troublé par la querelle des Armagnacs et des Bourguignons qui, depuis sept ans, profitent de la faiblesse du pouvoir royal pour entretenir la guerre civile.
Le sire de Joigny vient à Montfort pour informer François de Villiers que le roi Henri V d’Angleterre a débarqué en Normandie à la tête d’une grande armée. Vincent dont le père était vassal du comte d’Auxerre, désireux de combattre, peut accompagner Joigny. Avec Gérard Hervaux, le valet de Joigny, il part vers Paris. Au cours de la traversée de la forêt de Bière, des brigands attaquent. Joigny est blessé à la poitrine, son cheval est mort et Chauvigny, faisant front tout en protégeant son cheval Ardent, est blessé à la cuisse. Le trio se retrouve à l’auberge de La Butte Saint- Louis de Bois-le-Roi où un barbier soigne les blessés.


Après plusieurs semaines, ayant appris que le roi d’Angleterre avait fait le siège de Harfleur, le trio rétabli se dirige vers Rouen et retrouve le comte d’Auxerre, en compagnie du sire de Méricourt qui sympathise avec Vincent.
Aux côtés d’une armée désordonnée et des chevaliers bourguignons, Joigny, Vincent et Philippe de Méricourt montent vers la Somme  où Henri V d’Angleterre a massé dix mille hommes sur les hauteurs dominant la plaine boueuse d’Azincourt. Les Anglais plantent de gros pieux en avant de leur camp et attendent. 


Sous la pluie, les Français restent toute la nuit, en selle, dans leur bourbier, avec leurs lourdes armures sur leurs chevaux enlisés. Il fut facile aux archers anglais, depuis leur butte protégée, de cribler de flèches chevaux et seigneurs paralysés sur leurs montures. Chauvigny et ses compagnons sont placés à l’aile droite sur une prairie où un feu est allumé. Ils combattent. Claude Joigny et Gérard ont disparu sur le champ de bataille. Méricourt est grièvement blessé. Mourant, il demande à Vincent de donner une bague au comte Bertrand d’Armagnac et de l’informer de l’ampleur de ce désastre et du massacre de l’armée française le 25 octobre 1415. Ce qui fut fait dans le palais de Charles VI à Paris où Vincent est écoeuré par la continuation de la haine en Armagnacs et Bourguignons comme si personne ne se souciait du royaume de France.              
Le comte d’Armagnac devenu connétable charge Chauvigny d’une mission de reconnaissance dans l’enceinte de Paris. Il découvre des villages dévastés et les soldats Armagnacs et Gascons qui l’accompagnent se vantent sans vergogne d’avoir embrasé ces villages et massacré la plupart des habitants. A sa grande surprise, Chauvigny retrouve Claude Joigny et Gérard qui ont échappé à un massacre de prisonniers et lui apprennent que l’armée d’Henri V s’est rembarquée à Calais. Quelque temps plus tard, Vincent de Chauvigny et Claude Joigny participent en vain à l’assaut des Anglais à Harfleur. En 1416 l’empereur Sigismond d’Allemagne s’allie à Henri V et lui reconnaît tous les droits à la couronne de France.
Un jour, dans la rue, Chauvigny sauve le jeune Breton Antoine Robin des griffes des Gascons et de la potence.
Un an plus tard, le Dauphin Jean de Touraine s’éteint. Charles, troisième fils de Charles VI  devient Dauphin à 14 ans. Chauvigny et Joigny sont sidérés par sa laideur et son aspect chétif et souffreteux. Or, deux mois plus tard, Henri V reprend sa guerre contre Charles VI alors que barons et chevaliers français sont morts à Azincourt. La guerre civile continue et la reine Isabeau de Bavière exilée à Tours et qui ne songeait qu’à ses plaisirs crée un gouvernement hostile à celui de son fils avec l’aide des Bourguignons.
En ami 1418, les Bourguignons entrent dans Paris. Chauvigny, Joigny, Gérard et Robin se dirigent vers l’hôtel Saint-Paul pour secourir le Dauphin. Les Gascons viennent aussi soutenir le duc de Touraine. Le dauphin et son petit escadron doivent affronter des fantassins bourguignons mais les cavaliers du prévôt de Paris Tanguy du Châtel viennent en renfort. Quand le dauphin est à nouveau menacé par les Bourguignons,  en criant « Montjoie ! Saint Denis ! », Chauvigny s’élance et dégage le Dauphin. Tanguy du Châtel, émerveillé par tant de bravoure, adoube lui-même sur le champ Vincent ainsi accueilli dans l’ordre de la chevalerie avant que le Dauphin ne gagne Melun.    

     
Bertrand d’Armagnac n’a pas pu fuir et il a été égorgé. Plus tard, Tanguy du Châtel a été tué par le duc de Bourgogne. Jean Sans Peur ayant été égorgé lui aussi par Tanguy du Châtel, son fils Philippe le Bon s’allie aux Anglais. Sous l’impulsion d’Isabeau de Bavière un honteux traité est signé le 21 mai 1420 entre Charles VI, Henri V et le duc de Bourgogne. Isabeau et le duc livrent la France aux Anglais.   
En septembre 1420, une troupe de 400 hommes commandée par Vincent de Chauvigny quitte Bourges pour Orléans. Dans la ville, les cavaliers  dispersent ou massacrent les « misérables routiers » qui s’en prenaient à la veuve de Philippe de Méricourt et à ses enfants. La veuve se félicite de rencontrer celui qui a assisté son mari, mort dans ses bras. Elle va accompagner la troupe vers Melun mais reste à Pithiviers où Geneviève de Méricourt remet une médaille de Saint Michel à Vincent qui ne tarde pas à apprendre que Melun est tombée.
Henri V et Charles VI décèdent en 1422. Le dauphin devient donc Charles VII et Chauvigny jouissant d’un grand crédit à la cour est chargé d’annoncer à Marie d’Anjou qu’elle est reine de France. Quittant Bourges, Chauvigny en profite pour se rendre chez la baronne de Méricourt.  Il y rencontre Geneviève devenue une belle jeune femme à qui il déclare sa flamme.
En mars 1425, Yolande d’Aragon, « reine de Sicile » et mère de Marie d’Anjou conseille au roi de choisir Arthur de Richemont comme nouveau connétable. Il accepte.
Vincent de Chauvigny participe à un tournoi après avoir fixé à son casque un « gage d’amour » de Geneviève de Méricourt. Malgré une blessure au défaut de la cuisse, il gagne le tournoi.
Malheureusement, Georges de la Trémoille, nouveau favori du roi, fastueux et brutal, fait exiler le connétable de Bretagne. Le roi, abandonné de ses courtisans, n’est plus souverain que de nom. Les Anglais s’emparent de l’Anjou et du Maine. Madame de Méricourt et Geneviève doivent quitter la cour pour le duché d’Orléans.     
Six mois plus tard, Chauvigny arrive à Loches et apprend le départ de sa chère Geneviève. Il se rend chez le roi avec Marie d’Anjou et tous deux arrivent à le convaincre, malgré La Trémoille goguenard, d’attendre la venue de Jeanne la Pucelle et de rester dans le royaume de France.  A Orléans, Chauvigny retrouve Geneviève au chevet des blessés. Il revoit aussi Joigny qui s’est marié et Gérard Hervaux.
En février 1429, bourgeois et chevaliers d’Orléans et troupe du comte de Clermont veulent s’emparer d’un convoi de harengs destiné aux Anglais. Mais dés qu’il apprend que Dunois commande  les gens d’Orléans, Le comte de Clermont, jaloux, attaque en désordre à Rouvray les Anglais qui criblent de flèches les assaillants. Dunois évite seulement la panique mais « La Journée des harengs » est une défaite qui provoque le départ des nobles.
Un soir que Chauvigny ordonnait un tir de bombardes sur une bastille anglaise, les cloches annoncent l’arrivée de Jeanne par la porte de Bourgogne. La jeune fille ne tarde pas à attaquer mais elle est blessée d’une flèche. Robin, le valet de Chauvigny, se sacrifie pour son maître en se plaçant devant lui et meurt. Les Anglais, découragés, quittent Orléans et Vincent et Geneviève se marient à la cathédrale Sainte-Croix mais le combat continue pour bouter les Anglais hors de France.

Ce récit de Louis Saurel perd de son intérêt quand l’action s’étire au fil d’une quinzaine d’années. Bien sûr, on retrouve les scènes classiques du jeu de la quintaine, de l’adoubement, du siège d’une ville. La bataille d’Azincourt est bien évoquée mais il était inutile d’ajouter d’autres faits prétendument historiques. Les personnages sont trop nombreux et trop fugacement décrits pour qu’on s’y intéresse vraiment. Le roman magnifie surtout les actions des chevaliers (encore que les trahisons et les coups tordus ne manquent pas), alors que le peuple est bien souvent ignoré, voire méprisé. Par exemple, quand Chauvigny demande à la soldatesque ce que sont devenus les vilains des villages embrasés et qu’un crétin digne d’un cul de basse-fosse lui répond qu’ils ont été « branchés ou jetés à la Seine », Chauvigny, bien qu’indigné, « jugea cependant préférable de ne rien dire » !


(Rappelons que les violences des récits historiques "passent" beaucoup mieux que celles du western ou d'autres genres ciblés par les censeurs de la loi de juillet 1949 !)     
En outre, Louis Saurel semble prendre beaucoup de libertés avec la vérité historique.
Ce qui est finalement, le plus intéressant, ce sont les illustrations évocatrices et soignées de Pierre Joubert.  



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