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jeudi 29 novembre 2018

L'Epopée de Gilgamesh dans la presse des jeunes et la littérature jeunesse


L’Épopée de Gilgamesh dans la presse des jeunes et dans les ouvrages
accessibles à la jeunesse

Sauf erreur de ma part, la presse pour la jeunesse a rarement informé jusqu’ici ses jeunes lecteurs de l’existence de L’Épopée de Gilgamesh.
Je citerai seulement :



- Une aventure palpitante : Gilgamesh : Hebdomadaire Pilote n° 402 du 6 juillet 1967
L’Épopée de Gilgamesh en bandes dessinées de José Bielsa : pages 23 à 29.
Pilotorama : Khafaja dans l’antique Sumer (dessin double page de Henri Dimpre)




-         Gilgamesh, le premier héros de l’humanité : Mensuel Virgule n° 107, novembre 2018. Editions Faton. Pages 12-21.

« Né il y a cinquante siècles, dans sa première version, ce long poème à la fois étrange et familier n’a rien perdu de sa force tragique. Ses quelque trois mille vers dont nous connaissons à peu près les deux tiers, couvrant douze tablettes, souvent incomplètes, parfois impossibles à reconstituer dans leur intégralité, nous parlent d’abord du sort commun à tous les hommes, celui d’être mortel (…).
     L’Epopée de Gilgamesh raconte l’histoire devenue légendaire du roi d’Ourouk, une Cité-État dont il aurait été le souverain vers 2650 ou 2600 av. J.-C et dont il subsiste des ruines en Irak (sous le nom actuel de Warka).
Gilgamesh, seigneur tyrannique de la cité d’Ourouk, s’affronte à son rival Enkidou, un homme sauvage créé par les dieux pour le ramener à la raison.
Devenus amis après s’être battus, les deux hommes partent au coeur de la Forêt des Cèdres pour vaincre le géant Houmbaba.
Séduite mais repoussée par le roi vainqueur Gilgamesh, la déesse Ishtar se venge en lâchant sur terre le taureau céleste, tué à son tour.
Mécontents du rôle irrespectueux d’Enkidou, les dieux le font mourir au grand désespoir de Gilgamesh.
Le roi d’Ourouk décide de partir à la recherche d’Outa-Natpishtim, seul humain devenu immortel. Sa quête échoue et il ne peut goûter la plante de l’éternelle jeunesse dévorée par un  serpent. Il rentre à Ourouk, résigné et plein de sagesse.      
     La patience des archéologues, depuis un siècle et demi, a permis de retrouver différentes versions de cette œuvre, dispersées dans l’ensemble du Moyen Orient, en Anatolie, des lisières du plateau d’Iran jusqu’aux rives de la Méditerranée, des pays de la Mésopotamie à la Palestine, en passant par la Syrie et le Liban. D’abord transmise oralement pendant plusieurs siècles, déjà rédigée à partir du IIe millénaire av. J.-C., elle a été traduite ou adaptée dans différentes langues, à des époques différentes. »
(L’Épopée du roi Gilgamesh et de son ami Enkidou
Adaptation libre par Raymond Perrin, L’Harmattan, 2013 « La légende des mondes »  
Extrait de l’introduction.)


                                             Ouvrages accessibles aux scolaires
Au départ, les scolaires ne disposaient guère que de la version de Pierre Grimal Histoire de Gilgamesh parue dans Contes et légendes de Babylone et de Perse /chez  Pierre Grimal chez Nathan en 1962, dans la fameuse collection « Contes et Légendes de tous les pays ».
Plus tard, Henri Gougaud propose Enkidou et Gilgamesh (Sumer) dans: L'Arbre à soleils de Henri Gougaud. collection « Points » au Seuil.
Il faut attendre 1996 pour lire  La Célèbre légende babylonienne du roi Gilgamesh qui voulait être immortel de Jiri Tomek traduit par Llona Lartigue, dans Contes de l'Antiquité, chez  Gründ, collection « Les Grands classiques de tous les temps ».
L’introduction des textes fondateurs dans les programmes du collège va entraîner une profusion de publications à partir de 2001. On remarque ainsi :
- L’Épopée de Gilgamesh racontée par Michel Laporte
dans 6 récits de Babylonie – Paris : Castor Poche Flammarion, 2001 pp. 45-103.
* Le Premier Roi du monde. L’Épopée de Gilgamesh / Jacques Cassabois – Paris : Hachette Jeunesse, 2004, (« Livre de poche jeunesse ; 1008 »)     
- Gilgamesh / adaptation de Léo Scheer
« Le premier roman de l’Histoire » « Librio », 2010.
* Gilgamesh / Adaptation de Martine Laffon d’après la traduction de Jean Bottéro,
Dossier par Françoise Santoni-Bissaïn
Paris : Belin-Gallimard, 2009. 126 p
« Texte intégral et Dossier / ClassicoCollège »
* L’Épopée de Gilgamesh racontée par Pierre-Marie Beaude
Pierre-Marie Beaude – Paris : Gallimard Jeunesse, 2009. 128 p.
« Folio junior Textes classiques ».
* Le Récit de Gilgamesh. L’homme qui partit en quête de la vie sans fin  / Traduction remaniée et abrégée par Stéphane Labbe
- Paris : École des Loisirs, 2010. « Classiques abrégés », 140 p.
* Gilgamesh, le roi qui ne voulait pas mourir par Viviane Koenig
- Paris : Oskarson (Oskar Jeunesse), 2010. 160 p. Ill. : Erwan Pagès « Histoire & Société ».
* L'Épopée de Gilgamesh en 8 récits par Jean Muzi
- Paris : Flammarion Jeunesse, 2011. 128 p. Illustrations de Frédéric Sochard.
* Gilgamesh Adaptation, présentation et commentaires par Alain Migé
- Paris : Editions Larousse, 2012. 127 p. « Petits classiques Larousse ; n° 178 »

Je me permets d’ajouter mon ouvrage :
* L’Épopée du roi Gilgamesh et de son ami Enkidou
Adaptation libre par Raymond Perrin
-          Paris : L’Harmattan, 2013 « La légende des mondes ».   


jeudi 15 février 2018

Johnny Hallyday dans la presse des jeunes, début années 60


Johnny Hallyday dans la presse des jeunes au début des années 60

Tant pis si l’actualité tonitruante sur le sujet ne s’y prête pas, voici quelques images du chanteur apparues surtout dans le journal « Pilote » en 1962 et 1963.

Marcel Bisiaux, est nommé rédacteur en chef du journal « Pilote » en janvier 1962. Sous-titré « Grand magazine des jeunes » puis « Magazine des jeunes de l’an 2000 », l’hebdomadaire cible maintenant un public adolescent et parle bientôt des « copains », avec l’assentiment de Georges Dargaud et la désapprobation de Goscinny, de tout temps réfractaire à toutes les modes. 
A la fin de l’année, quelques couvertures sont vouées aux « vedettes » de la chanson. (Le magazine Salut les copains, né en 1962, qui tire alors à plus d’un million d’exemplaires suscite des envies de copier une formule qui réussit et Marcel Bisiaux veut adapter Pilote à la nouvelle mode en faisant intervenir vedettes de la chanson et animateurs proches de ce courant. 
C’est une lourde erreur car les lecteurs, dont on a sous-estimé le goût et l’intelligence, ne suivent absolument pas.  
En 1963, Marcel Bisiaux cède de plus en plus à la mode yé-yé. Anne-Marie Peisson, speakerine télévisuelle, et François Janin interviennent dans le journal, tout comme Jacqueline Caurat pour la philatélie. On recrute Roger Couderc et son fils Laurent pour parler des sports. 
Outre Johnny Halliday, les chanteuses Françoise Hardy, Sheila et Sylvie Vartan accaparent la Une du magazine. Tout cela  provoque une chute vertigineuse des ventes. Un événement annexe a pu jouer en introduisant une mauvaise image de la génération « yé-yé ». C’est la fameuse fête organisée le 22-23 juin 1963, place de la Nation par Daniel Filipacchi, créateur du journal et de l’émission de radio correspondante sur Europe n° 1 : Salut les copains. (On fête le 1er anniversaire du mensuel). Des journalistes comme Philippe Bouvard et Pierre Charpy (« Salut les voyous ») se déchaînent alors contre cette jeunesse turbulente. Heureusement à contre-courant, Edgar Morin, en juillet 1963, fait part de ses réflexions plus positives dans Le Monde.


Fin 1963, c’est  la naissance d’un vrai journal de bandes dessinées quand Dargaud renvoie Bisiaux, menace de saborder « Pilote » et appelle Goscinny et Charlier pour sauver le journal. Ils deviennent corédacteurs en chef en septembre (Charlier jusqu’en octobre 1972).

Johnny Hallyday devenu « L’idole des jeunes » (expression vient d’une chanson de Ricky Nelson, on l’oublie souvent), a déjà imposé sa musique rock et « yé-yé » (selon Edgar Morin dans le journal « Le Monde »).


Johnny Hallyday s’est déjà produit auparavant au Palais des Sports en 1961, à l’Olympia en 1962. Il est apparu seul ou avec Sylvie Vartan sur des couvertures du mensuel « Salut les copains », en 1962, sous la houlette de Frank Ténot et Daniel Filipacchi, animateurs de l’émission éponyme sur Europe N° 1 depuis 1959. (Le titre est inspiré par une chanson de Pierre Delanoë chantée par Gilbert Bécaud depuis 1958).


En 1969-70, paraissent sept numéros de l’hebdomadaire « Johnny le journal de l’âge d’or ». Cet illustré mêlant des bandes dessinées actuelles de qualité médiocre et des classiques de l’âge d’or américain avait peu de chances de durer, surtout que le nombre de pages se réduit au fur et à mesure des parutions.




Profitant dans doute de la sortie du western spaghetti de Sergio Corbucci et Gastone Moschin, « Le Spécialiste » avec Johnny Hallyday en vedette, Dans ce western assez conventionnel, Hud le cow-boy se rend à Blackstone pour venger son frère. Jean Tosan et Alain Schwartz ont lancé leur journal grand format mais en oubliant de consacrer au moins un article au chanteur-acteur. Toutefois, la sortie du film s’est accompagnée d’une adaptation (inachevée) en bande dessinée par le grand Jijé (alias Joseph Gillain), avec la collaboration de son fils Philipp, sous le titre Hud, le spécialiste (8 planches seulement sont parues).   


        Les couvertures de "Salut les copains" concernant Johnny Hallyday sont bien connues. C'est pourquoi je n'en reproduis qu'une, celle du numéro 10. J'ajouterai celle d'un numéro de "TOP Réalités Jeunesse", un bimensuel moins connu. Cette photo de Johnny Hallyday à cheval évoque probablement le western camarguais de Noël Howard "D'où viens-tu Johnny ?" tourné en Provence en 1963 et dans lequel Johnny Hallyday chante : "Pour moi la vie va commencer" sur des paroles de Jean-Jacques Debout.








samedi 10 février 2018

Sartre, les illustrés; la censure et "Les Mots"


Jean-Paul Sartre, les illustrés, la censure et Les Mots

Pourquoi diable, la revue de Jean-Paul Sartre, Les Temps Modernes, a-t-elle choisi deux fois (en 1949 et en 1955) de publier des articles d’auteurs traduits pour condamner les illustrés, c’est-à-dire  la bande dessinée.
La première fois, ce fut dans son n° 43 de mai 1949 à travers un article attaquant les « comics » d’une façon délirante, voire démentielle, en tout cas exagérée. Ce n’est pas un hasard si ce fut deux mois avant l’adoption par le Parlement français de la loi scélérate du 16 juillet 1949 sur les publications destinées à la jeunesse (dont il faut relire l’absurde Article 2 qui permet d’attaquer n’importe quel écrit).


Les responsables de la dite revue, sans doute sous la pression de leurs amis communistes. (Ils en étaient souvent restés aux propos de Georges Sadoul datant de 1938, jugeant les illustrés comme des « condensés de crimes »). Les dirigeants des Temps Modernes auraient été bien inspirés de se documenter sur l’auteur de Psychopathologie des comics (traduction flatteuse de Not For Children) de Gershon Legman (1917-1999).
Il s’agit comme l’indique aujourd’hui sa fiche Wikipédia, d’un auteur grivois, véritable obsédé sexuel, censuré pour ses propres écrits pornographiques et qui « ne jouit pas de toutes ses facultés » comme l’écrivaient en 1997 Harry Morgan & Manuel Hirtz dans leur ouvrage commun : Le Petit Critique illustré.
Selon Legman qui assure que la génération américaine postérieure à 1950 ne sait pas lire et les « comic-books » donnent aux enfants « un cours complet de mégalomanie paranoïaque ». Ils véhiculent « les mêmes traits d’homosexualité et de sadisme que dans le nazisme » et Wonderwoman semble être pour lui une lesbienne.


Quand le docteur et psychiatre Fredric Wertham, en octobre 1955,  publie dans le n° 118 de la revue Les Temps Modernes (dont Jean-Paul Sartre est toujours le directeur) des extraits de son ouvrage  Seduction of the innocent sous le titre Les « crime comic books » et la jeunesse américaine, il reprend, sans preuve, la fameuse accusation faite aux bandes dessinées et maintes fois reprise de favoriser la délinquance juvénile. L’article aura d’autant plus de poids que Wertham, plutôt malhonnête, ne distingue pas les bandes dessinées classiques des « crime comic books » qu’il illustre de cases choisies et sorties de leur contexte. (L’Amérique qui n’en a pas fini avec McCarthy a adopté le Comics Code en 1954.)      


C’est ainsi, en tout cas, que Jean-Paul Sartre s’est fait le complice des censeurs des illustrés et de la bande dessinée, se mettant au même rang que feu l’abbé Bethléem, et reniant implicitement ses propres lectures d’enfance faites dans Cri-Cri, L’Épatant (publiant déjà Les Pieds Nickelés de Louis Forton), Les Trois Boy-scouts ou Le Tour du monde en aéroplane d’Arnould Galopin. Ces lectures d’images merveilleuses et fascinantes, il les confesse plus tard dans Les Mots (1964), une autobiographie si forte qu’elle aurait conduit, selon certains, à l’obtention du Prix Nobel (refusé par l’auteur).


Il apparaît ainsi pour l’instant comme le défenseur d’une culture élitiste bourgeoise, celle de son grand-père Charles Schweitzer, trahissant à la fois sa mère Anne-Marie complice de ses lectures d’illustrés et ses jeunes années revisitées plus tard dans l’autobiographie Les Mots.

Pour quels motifs aurait-il pu changer d’opinion sur le sujet évoqué dans le livre Les Mots, paru en 1964 mais dont il corrige les épreuves en avril 1963 ? La bande dessinée a globalement toujours mauvaise presse mais en 1963 Jérôme Peignot publie chez Denoël le recueil Les Copains de notre enfance (mais l’anthologie de François Caradec I Primo eroi n’a pas franchi les frontières de l’Italie !). En France, Francis Lacassin (déjà auteur en 1963 d’un Tarzan, mythe triomphant, mythe humilié dans la revue Bizarre), crée le Club des bandes dessinées avec Alain Resnais, Evelyne Sullerot, Jacques Champreux, Pierre Couperie, Jean-Claude Forest et Jean-Claude Romer. Le Club diffuse le bulletin illustré Giff-Wiff.
Il serait sans doute naïf de croire que ces petits faits éditoriaux, pas plus que la naissance de Pilote en 1959 ou le succès populaire grandissant de Tintin et d’Astérix aient pu avoir une quelconque influence sur les opinions de Jean-Paul Sartre qui reparlera néanmoins de ses illustrés dans le documentaire d’Alexandre Astruc et Michel Contat : Sartre par lui-même en 1972.        
    
  


lundi 18 décembre 2017

"Le Petit Canard pour les jeunes " et "La Liberté de l'Est pour les jeunes", 2e série (3)

« Le Petit Canard pour les jeunes », supplément jeunesse de journaux régionaux

Deuxième série (décembre 1948-juillet 1949)


La deuxième série de l’hebdomadaire Le Petit Canard quoi débute le 2 décembre 1948 aura la sagesse de conserver le temps de ses 32 numéros le format 25 sur 32 cm.
Les 10 premiers numéros mettent en grand titre le nom du quotidien régional avec l’additif « pour les jeunes ». A l’époque, parmi les journaux qui publiant le supplément, on relève La Nouvelle République (du Centre, de Bordeaux et du Sud Ouest), L’Yonne Républicaine, Nord littoral, Midi libre, Paris Normandie et La Liberté de l’Est… 
Par exemple, on lit : La Liberté de l’Est pour les jeunes, la mention Le Petit Canard « interdit aux grandes personnes » étant reléguée en petit format en haut et à droite de la page de titre.


Alors que la pagination est au départ de 8 pages, à partir du numéro 14, le 3 mars 1949, le journal adopte 12 pages du même format initial (25 sur 32 cm.).
Le supplément maintient ses 12 pages sauf dans le dernier numéro 32 « Spécial de vacances » de juillet-août 1949 qui en comporte 20. 

Ce qui frappe d’emblée, c’est la fin de la vision hexagonale étriquée du journal et son ouverture sur  le monde, même si la vision colonialiste ou exotique subsiste, par exemple dans Aventure en Afrique (couverture du n° 15) ou Dans la forêt cinghalaise (n° 27) ou encore  dans l’évocation de Savorgnan de Brazza dans A la conquête du Congo (n° 28).

Le numéro 1 est illustré en couverture pas Poléon (Louis Lempereur) qui, outre un grand dessin du « caneton » introduit l’animal dans une BD (presque) muette de 8 vignettes. Cette même présentation se poursuit jusqu’au n° 13 mais dès le n° 11, le 10 février 1949, réapparaît le titre : Le Petit canard pour les jeunes et ce, jusqu’au n° 32.


La 1ère page indique que le rédacteur en chef  est « Votre ami Jaboune », alias Jean Nohain.
Aux 8 pages dont 4 en couleurs, le journal ajoute un supplément de 4 pages en noir et blanc de format 22 sur 30 cm. intitulé « Notre club Audace et cran », dès le numéro 5 jusqu’au numéro 13. Par exemple, dans le n° 6, Paul-Emile Victor raconte à la 1ère personne « Comment je suis est allé au Pôle Nord » et le cinéaste Albert Mahuzier évoque son aventure vécue « Quand je filmais les éléphants » d’Afrique.
Le magazine s’ouvre un peu au cinéma en présentant quelques films américains : L’Appel de la forêt, Jody et le faon, Aventure en Irlande, Jupiter (il s’agit en fait du film américain Jupiter le fils de Flicka)...  
Jacques Faizant qui avait déjà précédemment publié Les Nouvelles aventures du Colonel Broum dispose de la dernière page en couleurs pour sa bande intitulée Boudoche, Patapoum et l’infatigable Colonel Broum. Comme on le voit ci-dessous, le texte envahit toujours autant l'image.


Il publie en outre un strip muet : L’Invraisemblable Monsieur Pluche. Daniel Laborne, le créateur de Lariflette, lui crée un fils, Tatave, tout aussi comique. Dans un autre registre, Joe Hamann (auteur et cinéaste), en y mêlant des aspects autobiographiques, écrit et dessine Le Véridique et passionnant récit (de) Mes aventures au Far-West. Le titre est plus pompeux que le résultat.
  
En dépit de son parti pris d’optimisme, la publication reflète pourtant quelques inquiétudes d’une époque qui ne croit pas, à tort, à une longue période de paix en France. Deux bandes dessinées reviennent sur L’Épopée de la bataille de l’eau lourde et sur Le Mystère de la bombe atomique.


Sur une demi largeur en page 3 paraissent des bandes dessinées verticales sans ballons retraçant la vie de grands sportifs, d’abord Marcel Cerdan « la vie d’un grand champion », puis le cycliste René Vietto « le champion malchanceux », le coureur à pied Marcel Hansenne, le nageur Alex Jany, le footballeur Larbi Ben Barek, les cyclistes Jean Robic et Fausto Coppi, le catcheur Charles Rigoulot. Plus tard seront à l’honneur les boxeurs Raymond Famechon, Laurent Dauthuille et Joe Louis, l’aviateur Marcel Doret, le skieur James Couttet, l’escrimeur Christian d’Oriola, le coureur automobile Louis Rozier… On chercherait en vain le nom d’une sportive !
L’univers du Petit Canard est essentiellement masculin, sauf rarissime exception. Les fillettes n’ont droit qu’à leur photo dans « l’album des canetons » ou dans le « Tableau d’honneur » des élèves méritants.


  
Les pages centrales sont occupées par quatre bandes dessinées en couleurs.
La présentation des deux pages centrales en couleurs sera immuable. En haut, une bande dessinée horizontale (Après Dédé et Lolo par Mary, Histoires cocasses de Mr Candide par Evariste,  Au centre, une bande plus large que haute. D’abord la bande anonyme  : Les Aventures de deux Gamins à la Radio. (Il n’est pas impossible que Jaboune soit l’auteur du scénario. Quant au dessin, il évoque le style d’Alain Saint-Ogan). Deux jeunes lycéens  provinciaux font le pari de chanter à la radio. Venus à Paris, il s’introduisent plusieurs fois dans une station de radio parisienne ou ils rencontrent le radio-reporter célèbre Georges Briquet puis Jean Nohain (encore porteur de cheveux malgré sa calvitie bien connue). Profitant de l’absence de Fernandel souffrant, les deux garçons gagnent leur pari en chantant Maître Pierre, un succès de l’époque dû à Henri Betti et Jacques Plante.
La prochaine histoire illustrée centrale est l'adaptation d'un roman d'anticipation scientifique de Pierre Devaux : XP15 en feu, un roman édité par Magnard dès 1945 et souvent réédité. 


De chaque côté, une bande verticale. D’abord, Kalumey par Barberousse (Philippe Josse, 1920-2010, surtout connu pour ses dessins humoristiques de chats et de souris), La Vie privée du soleil par Marianne Monestier pour le texte et  Francis Bernard pour le dessin, puis Ricounet au pays des Maharadjas, texte et dessin de Henri Fox (qui signe H. Fox) et Tafia le marin de Martial (Martial Durand, le futur auteur de Tony Laflamme et de Sylvie). Il aura pas le temps de développer la bande : Le Distingué professeur Molluscet Burett le robot.          

Quand paraît le dernier numéro 32 « Spécial de vacances » de juillet-août 1949, les  des récits ou bandes dessinées des numéros 31 et 32 portant encore la mention « à suivre ».


Ce n’est sans doute pas un hasard si Le Petit Canard s’interrompt, comme beaucoup d’autres journaux sabordés à l’époque, au moment où est publié le texte de la loi du 16 juillet 1949 sur les publications destinées à la jeunesse.    
 




samedi 16 décembre 2017

"Le Petit Canard" supplément de "Bonjour Dimanche" (2)

« Le Petit Canard » supplément jeunesse de « Bonjour Dimanche » (2)
Contenu de la première série

Rappelons que cette première série du magazine Le Petit Canard s’étend sur 130 numéros du 9 juin 1946 au 28 novembre 1948
Quand Jean Nohain crée Le Petit Canard, il a déjà une bonne expérience de la presse des jeunes puisqu’il avait fondé le journal Benjamin en 1929 et il en avait été le rédacteur en chef jusqu’au 31 août 1939.
Il a déjà collaboré avec Pinchon sous le pseudonyme de Jaboune pour la bande dessinée La Famille Amulette (sans parler des bandes Grassouillet et Frimousset déjà scénarisées avant la guerre pour d’autres journaux avec le même Pinchon).  D’ailleurs Frimousset revient pour une bande mêlant texte sous la vignette et dialogues dans l’image, intitulée Frimousset détective.    


C’est encore le dessinateur de Bécassine qui illustre la chronique Caneton historien évoquant avec naïveté et humour les étapes traditionnelles et stéréotypées de l’Histoire de France.
Comme dans Benjamin, Jean Nohain demande aux lecteurs de participer au journal Le Petit Canard, en donnant des sujets de dessins pour la bande muette Picotin votre âne de Joseph-Porphyre Pinchon et en envoyant charades, devinettes  histoires drôles... L’âne familier reviendra dans La Ferme de Picotin.
Jaboune répond à leurs lettres en les nommant et il sollicite des photos pour l’album de canetons. Il se fait parfois conteur alors que Francine Bergère écrit et dessine pour les tout petits.


C’est avec le dessinateur Poléon (Louis Lempereur) que Jaboune réalise Les Aventures du petit Gaulois, Totorix (accompagné de Papa Moustache et de Furax) qui préfigurerait Astérix pour certains. La planche 15 intitulée : Les Romains seront-ils les plus forts ? frappe rétrospectivement certains lecteurs). Les 30 planches parues seront réunies dans l’album Les Aventures de Totorix publié par les éditions Calmann-Lévy en 1952. Totorix revient en première page dans Totorix en vacances ou, à l’intérieur du journal, avec Les Interviews de Totorix. A la fin de la première série, Poléon dessine encore Les Aventures et les Inventions des Frères Georges d’après les idées de Jaboune et, à partir du 25 juillet 1948, Poléon dessine en couleurs les aventures moyenâgeuses et guerrières de Godefroy-le-Bouillant tandis que Georges Libault essaie d’intéresser les lecteurs à sa bande dessinée monochrome : Jim Mammouth  Cow-boy préhistorique.


Le journal de Jean Nohain, 100 % français, un  brin chauvin, voire nationaliste, est créé au moment où La France se relève difficilement d’une guerre longue et destructrice. Avec un optimisme constant et à toute épreuve, Jean Nohain incite les lecteurs et lectrices à faire preuve de cran et de courage. Défendant la laïcité et une stricte neutralité religieuse, il évoque pour eux les monuments et personnages de « Notre belle France » et « Les Beaux Anniversaires ».
On connaît la passion de cet homme pour tout ce qui est « bien de chez nous », passion qu’il dispensera aussi sur les ondes et à la télévision. Ce n’est qu’après 70 numéros que le magazine cesse de mettre met en scène une France métropolitaine blanche, avant que paraisse le récit Du « Jam » au Sahara qui emmène ces héros dans le Sahara. A la « Une » du n° 99, le cinéaste Albert Mahuzier raconte Dix jours avec mes amis les Touareg.


Jacques Faizant (futur dessinateur du Figaro, 1918-2006), au début de sa carrière, bénéficie souvent des pages centrales pour trois bandes dessinées en couleurs : Le Colonel Broum et Patapoum (et le sinistre Professeur Pioche), Pyk et Pato au centre de la Terre et Monsieur Mite, Mirabelle et Marmottin. Dans ces bandes hebdomadaires, un peu rapidement dessinées, le texte est parfois surabondant. Faizant n’hésite pas à faire intervenir des robots et de phénomènes fantastiques.
La science-fiction n’effraie pas le magazine qui publie La Terre ne répond plus (nous sommes en 2100), un récit de Janine Jacquemond illustré par Claude Henri (Juillard). En revanche, c’est une histoire de guerre que raconte un autre récit Un courrier partira ce soir, toujours illustré par Claude Henri (du n° 31 au n° 39).


Parmi les autres récits, on relève Les Aventures d’un chercheur d’or de Henri Iselin, auteur du texte et des dessins, Les Mémoires de Li-Fou, le plus jeune policier du monde, un texte de Mario de Cavelande, illustré par Mixi-Bérel. 


Poléon, à partir du n° 70, illustre le « grand récit inédit » d’André Sergent, intitulé Du « Jam » au Sahara, l’histoire des deux jeunes scouts François et Ahmed. Plus tard est publié le roman de Jean-Clair Guyot :  Le Châtelain de l’île déserte, qui promet des mystères et des aventures. A partir du n° 101, le romancier Saint-André, illustré en couleurs par Raoul Auger, raconte les exploits d’un neveu de Jean Bart dans  Les Aventures de Cornil Bart.
Si les bandes dessinées de Poléon et de Faizant appartiennent au genre comique, deux bandes de Claude Henri (Juillard) sont du genre dramatique.


A une époque encore très colonialiste, Claude Henri (Juillard) réalise deux bandes dessinées. Le Prince de Vijanagar (8 planches) oppose au Bengale un officier du 2e bureau à un prince hindou « rebelle et fanatique » tandis que Le Serpent jaune met en scène le même officier du 2e bureau menacé à Pékin par des Chinois qui s’opposent à la construction d’aérodromes français. Les deux bandes expriment malheureusement une hostilité et un racisme à l’égard des Asiatiques, tant dans le dessin que dans le texte.                 
L’illustrateur Claude Verrier (né en 1919) met en images La Famille Belle-Lurette dans des dessins naïfs et maladroits.
Quelques numéros spéciaux plus abondants paraissent comme Spécial Noël 1946 (N° 29, 20 pages) Numéro Spécial de Joyeuses Pâques (avec Alain Saint-Ogan, n° 44) et Numéro Spécial de Noël 1947 (n° 79, « 16 pages pour les amis du Colonel Broum »). Les exemplaires de Bonjour Dimanche (81 à 89) sont illustrés en couverture par Jean Bellus, Bernard Aldebert, Poléon, Mose, Beuville et Rogesam (l’auteur de la bande dessinée muette Farfelu).
La première série du Petit Canard, en dépit de rubriques variées, est donc d’inégale qualité. Le changement de format et parfois de titre ne pouvait pas assurer un succès constant à ce supplément comme le montre le déclin de la dernière partie de la série en noir et blanc et réduite à quatre pages.

Heureusement, tandis que se poursuit la bande dessinée d’espionnage de Francis Cassou : Destination inconnue, les derniers numéros 129 et 130 de novembre 1948 apportent de l’espoir en dévoilant certains aspects du nouveau Petit Canard promis pour le 2 décembre 1948. 

mercredi 13 décembre 2017

"Le Petit Canard", supplément jeunesse de "Bonjour Dimanche" (1946-1949) Première approche

« Le Petit Canard » supplément jeunesse de « Bonjour Dimanche »
Première approche

La presse juvénile franco-belge, en cette année 1946 et en dépit des pénuries de toutes sortes, est tout particulièrement riche. Outre Fripounet et Marisette, né en 1945, reparaissent les journaux catholiques Ames Vaillantes, Coeurs Vaillants (1946-1963) (Fleurus), Bayard (1946-1962), Bernadette (1946-1963) (Bonne Presse), Christiane (1946-1981).
Beaucoup d’entre eux ne dureront pas trois ans, tels L’Astucieux (1946-48), Bob et Bobette (1946-47), Cadet-Journal (1946), Coquelicot (1946), Dominique au large (1946-1947), France-Soir Jeudi (1946-1947), Frivolet (1946-1947),  Heroïc Albums (1946-1946), Jean-Bart (1946-1947), Jeudi magazine (1946-1947), Jeune Gars (1946-1948)  Le Journal de Bébé (1946- 1948), Kim (1946), Mon avenir (1946-1948), Mon Journal  (1946-1948), O. K. (1946-1949), Paris Jeunes (puis Aventures) (1946-1947), Pat (1946-1949), Pic et Nic et Cendrillon (1946-1948), Radar (1946), Récréation (1946-1947), Robin l'écureuil (1946), Tourbillon (1946-1947), Vaillante (1946-1948)… Seront plus solides des journaux déjà présents avant la guerre comme Fillette (1946-1964), La Semaine de Suzette (1946-1960) et Spirou (en Belgique en 1938, en France en 1946) mais aussi les nouveaux, Coq Hardi (1946-1955), Francs- Jeux (1946-1979), Tarzan (1946-1953), et Zorro (1946).


C’est dans ce contexte peu favorable, compte tenu du grand nombre de publications juvéniles en présence, que paraît Le Petit Canard. Dont la longévité excède de peu les 3 ans puisqu’il paraît de juin 1946 à août 1949.  
Né en 1946, ce supplément hebdomadaire « interdit aux grandes personnes » est donc destiné aux enfants, sans qu’il soit fait mention d’un âge particulier.
Il accompagne la publication hebdomadaire « Bonjour Dimanche » diffusé par plusieurs quotidiens régionaux, comme La Nouvelle république ou, dans les Vosges, le quotidien départemental La Liberté de l’Est.
Son rédacteur en chef qui signe Jaboune est bien connu puisqu’il s’agit de Jean Nohain (alias Jean-Marie Legrand, 1900-1981), conducteur de char et résistant, déjà créateur du journal Benjamin avant la guerre, animateur de radio et bientôt de télévision, auteur de chansons (pour Mireille), écrivain et éditeur… Il rédige d’ailleurs lui-même de nombreuses rubriques du journal.
Toutefois, à Noël 1946, on précise que le rédacteur en chef est Jean Tournebise.
Il s’entoure dès le départ d’auteurs et de dessinateurs, parfois connus comme Joseph-Porphyre Pinchon, l’auteur de Bécassine mais le plus souvent à l’aube de leur carrière, tels Jacques Faizant, Poléon (Louis Lempereur), Claude-Henri (Juillard), Martial (Durand) ou Daniel Laborne…  
 
         Première série

Le Petit Canard « interdit aux grandes personnes », publié sur 8 pages, change plusieurs fois de format entre sa naissance le 9 juin 1946 et sa disparition en août 1949.
On peut considérer deux séries, la première qui s’étend sur 130 numéros du 9 juin 1946 au 28 novembre 1948, la seconde pour 32 numéros parus entre le 2 décembre 1948  et juillet-août 1949.
(J'ignorerai la 3e série éphémère de la publication, publiée du 3 décembre 1950 au 28 mars 1951 mais sans Jean Nohain).  
Pardon pour la description un peu fastidieuse qui suit mais cet effort de clarification est d’autant plus nécessaire que ce supplément « jeunesse » est fort mal connu.

1) D’abord de format 24 cm sur 33, du numéro 1 au numéro 80, daté du 14 décembre 1947, Le Petit Canard « interdit aux grandes personnes » a pour rédacteur en chef Jaboune, alias Jean Nohain tout au long de son histoire.


2) Tout en maintenant sa hauteur, il adopte une largeur de 25 cm quand il prend pour titre Bonjour Dimanche avec son supplément le 21 décembre 1947 jusqu’au numéro 89, daté du 15 février 1948.



3) Redevenu en 1ère page Le Petit Canard le 22 février 1948 pour le n° 90, il conserve le même format (25 sur 33 cm) jusqu’au 21 mars 1948 (n° 94).


4)  Adoptant le titre Le Petit Canard pour la jeunesse et pour les plus jeunes avec le numéro 95, non daté (en fait, le 28 mars 1948), il passe à quatre pages de format géant : 33 cm sur 60. Ce format, malgré l’adoption de la polychromie, ne semble pas une réussite puisqu’il ne subsiste que jusqu’au n° 102 du 16 mai 1948.  


5) Le Petit Canard pour la jeunesse et pour les plus jeunes, en conservant la polychromie et en repassant à 8 pages, adopte le format 30 cm sur 43 le 23 mai 1948 (n° 103) jusqu’au 27 juin 1948 (n° 108).

6) L’hebdomadaire semble connaître une forte période de déclin.
En conservant le même format (30 cm sur 43) mais en passant à quatre pages seulement, il redevient Le Petit Canard interdit aux grandes personnes. Il perd en outre ses couleurs en page 1 et 4. Seules les pages intérieures 3 et 4 sont en couleurs. Ni la date, ni le numéro du supplément ne figurent à un endroit quelconque du journal.


Cette situation perdure jusqu’à la publication du n° 130 le 28 novembre 1948.
Nous verrons plus tard la seconde série, sans doute la plus riche et la plus divertissante.