mercredi 26 mars 2014

DYLAN STARK de Pierre Pelot numérisé chez Bragelonne

DYLAN STARK réédité en numérique chez Bragelonne

Antihéros plongé dans la Guerre de Sécession et les troubles nés d'une paix précaire. C’est surtout pendant ces années de l’après-guerre qu'on le voit  évoluer, de 1865 à 1867. Personnage de fiction inséré dans un cadre géographique et historique plausible, il subit d’autant plus les séquelles d’une telle période qu’il est un métis né de mère française et de père cherokee. Les "sang mêlé" étaient historiquement nombreux mais la création d'un tel personnage permet un regard tantôt exacerbé, tantôt critique et distancié sur les ethnies en présence : noire, blanche, indienne ou métisse.
Dylan Stark ressent toutes les violences d'un conflit mal éteint. Il fait face avec ses coups de cœur, parfois violents mais sans jamais céder au manichéisme, plus soucieux de traquer l'injustice que de restaurer la justice, une tâche qu'il estimerait illusoire.


Comme nous l’avons déjà écrit sur ce blog, on peut distinguer trois cycles dans ces aventures.
1) Le cycle de la vengeance jusqu’au retour vers les racines indiennes
2) Le compagnonnage avec Kija et la quête d’un hypothétique trésor
3) Le temps de l’errance et de la solitude

Les aventures de Dylan Stark ont d’abord été publiées de 1967 à 1969 par les éditions belges André Gérard de Verviers, dans la collection « Pocket Marabout » (pour 14 volumes)* mais d’autres aventures inédites plus discrètes paraissent chez d’autres éditeurs (Le Vent de la colère, Sierra brûlante, Pour un cheval qui savait rire…)   
A partir de 1980, dans la collection « L’Ami de poche », les éditions Casterman rééditent dix volumes des 14 volumes parus chez André Gérard.
Les éditions belges Claude Lefrancq ont publiés en 1997 et 1998 deux gros volumes Dylan Stark 1 (7 récits) et Dylan Stark 2 (sept récits dont l’inédit Plus loin que les docks). Seul Dylan Stark 2 a publié ma préface qui reste à ce jour une des rares introductions à la série. 
Le Navire en pleine ville republie en 2006 et 2007 quelques récits (dont Sierra brûlante).
C’est à partir de janvier 2014 que les éditions Bragelonne (après avoir déjà numérisé de nombreux livres de Pierre Pelot) commencent à éditer la série Dylan Stark en livres numériques dans la collection « Bragelonne Classic Western ».

Paraissent successivement :
      Quatre hommes pour l’enfer Dylan Stark - 1 / Pierre Pelot
- Paris : Éditions Bragelonne, janvier 2014.
Livre numérique. (Bragelonne Classic Western)
Le Vent de la colère Dylan Stark – 2 / Pierre Pelot
- Paris : Éditions Bragelonne, janvier 2014.
Livre numérique. (Bragelonne Classic Western)
La Couleur de Dieu Dylan Stark - 3 / Pierre Pelot
- Paris : Éditions Bragelonne, février 2014.
Livre numérique. (Bragelonne Classic Western) 
La Horde aux abois Dylan Stark - 4 / Pierre Pelot
- Paris : Éditions Bragelonne, février 2014.
Livre numérique. (Bragelonne Classic Western) 


Les Loups dans la ville Dylan Stark 5 / Pierre Pelot
- Paris : Éditions Bragelonne, février 2014.
Livre numérique. (Bragelonne Classic Western) 
Les Loups sur la piste Dylan Stark 6 / Pierre Pelot
- Paris : Éditions Bragelonne, février 2014.
Livre numérique. (Bragelonne Classic Western) 
Les Irréductibles Dylan Stark 7 / Pierre Pelot
- Paris : Éditions Bragelonne, février 2014.
Livre numérique. (Bragelonne Classic Western) 
Le Hibou sur la porte Dylan Stark 8 / Pierre Pelot
- Paris : Éditions Bragelonne, février 2014.
Livre numérique. (Bragelonne Classic Western) 


La Marche des bannis Dylan Stark 9  / Pierre Pelot
- Paris : Éditions Bragelonne, mars 2014.
Livre numérique. (Bragelonne Classic Western) 
Deux hommes sont venus Dylan Stark 10 / Pierre Pelot
- Paris : Éditions Bragelonne, mars 2014.
Livre numérique. (Bragelonne Classic Western)
7h 20 pour Opelousas Dylan Stark 11 / Pierre Pelot  (Récit court)
- Paris : Éditions Bragelonne, mars 2014.
Livre numérique. (Bragelonne Classic Western)
 (Chronologiquement, Plus loin que les docks devrait s’intercaler ici)
La Peau du nègre Dylan Stark 12 / Pierre Pelot
- Paris : Éditions Bragelonne, mars 2014.
Livre numérique. (Bragelonne Classic Western)
L’Homme-qui-marche Dylan Stark 13 (Récit court)
- Paris : Éditions Bragelonne, mars 2014.
Livre numérique. (Bragelonne Classic Western) 
Quand gronde la rivière Dylan Stark 14 / Pierre Pelot
- Paris : Éditions Bragelonne, mars 2014.
Livre numérique. (Bragelonne Classic Western) 



























Les épisodes 15, 16, 17 : Plus loin que les docksUn Jour, un ouragan et Le Tombeau de Satan ont été publiés le 14 juillet 2014. 



On attend encore les épisodes La Loi des fauves et et ceux qui ont été prépubliés dans  l’hebdomadaire Tintin : L’Erreur et L’Homme des monts déchirés.

* Contrairement à ce qui est écrit dans le Dictionnaire du Livre de Jeunesse, paru en 2013, c’est bien 14 volumes et non 10 qui sont parus dans la collection « Pocket Marabout ». En outre, Le Vent de la colère et Sierra brûlante (cités dans la notice sur Pelot)  appartiennent bien au cycle Dylan Stark.


jeudi 20 mars 2014

Mireille Pradier, conteuse et illustratrice à (re)découvrir

Connaissez-vous Mireille PRADIER ?

Non ? Moi non plus puisque j’ignore tout de ses dates et lieux de naissance, de vie et de mort. J’ignore tout de son parcours. Je prends pourtant l’insolente liberté de vous en parler (J’accepte volontiers les précisions des lecteurs du blog).
Cet auteure-illustratrice  qui semble seulement présente dans le monde de l’édition enfantine entre 1943 et 1946 (même s’il y a eu des rééditions ultérieures), une période trouble et troublée, serait encore davantage ignorée si l’illustrateur très connu Guy Sabran n’avait pas « imagé » (le terme s’écrit n’en déplaise aux puristes coincés) quelques-uns de ses textes. (Selon le site Internet Théâtre au vent, Mireille Pradier serait le pseudonyme de Mireille Forichon).


Chez l’éditeur (peu connu) Willeb, installé 13 Rue Marivaux à Paris, paraissent quatre de ces récits. Parlons d’abord de deux « histoires racontées ». Puisqu’il n’y a aucune indication quant à leur illustration, on peut supposer qu’elle les a illustrées elle-même.
Paraît d’abord en 1943 Agénor Kangourou se marie, un album de 32 pages très plaisant, au dessin à la fois souple et naïf. Agénor qui doit épouser Mademoiselle Virginie du Palmier ne s’est réveillé qu’à midi et tous les invités attendent. Parti en bicyclette, Agénor fait une chute de vélo avant d’être victime de deux grands boas qui veulent lui voler sa bague et le ligotent à un arbre. Son ami l’ours le libère, Agénor retrouve Virginie et le repas de mariage peut enfin commencer.    


Mireille Pradier a sans doute aussi illustré dans le même style clair et humoristique, Histoire de Lola la girafe géante, un album de 32 pages paru chez Willeb au cours du 3e trimestre de l’année 1945.
Lola est d’abord une petite girafe orpheline africaine adoptée par le Noir Papou des Béni-glou-glou qui vient de tuer sa mère d’une flèche. Les enfants adorent l’animal et se servent de son cou comme d’un toboggan. Elle grandit, devient géante et attire la jalousie d’une autre tribu qui tente de la capturer au lasso. Tirant d’un cou sec sur la corde lancée pour l’attraper, elle emporte pendus à son cou les guerriers ainsi vaincus. Lola décorée par Papou vit ensuite en princesse.      


Toujours chez Willeb paraissent encore Les Souliers de Rosette. Conte de Noël, un album de 32 pages illustré par M.-Th Auffray, paru en 1944 et réimprimé en 1945 et 48 et aussi La Vie de Jean de La Fontaine sous une couverture de G. Barret et avec des illustrations de M.-Th. Auffray. C’est un livre de 94 pages paru en 1946 dans la collection « Trois couleurs ».
L'éditeur Willeb a aussi publié en 1946 un conte de Noël de Mireille Pradier, illustré par Mô, intitulé La Révolte de l'âne, du boeuf et du mouton (8 pages). 
Autre éditeur privilégié de Mireille Pradier, l’éditeur parisien G.P. (alias Générale Publicité), chargé au départ d’honorer des commandes de Vichy, son directeur Victor Dancette s'étant refait une virginité en publiant l'album La Bête est morte, dessiné par Calvo) ). Mireille Pradier a la chance de voir ses textes illustrés par le réputé Guy Sabran (frère du romancier Jean Sabran, alias Paul Berna dont tout le monde a lu Le Cheval sans tête).
Sont édités successivement :
- Histoire des trois soldats de Goëldieu, un album de 30 pages écrit par Mireille Pradier et illustré par Guy Sabran G. P. Paris (1943, 1945 et 46).
- Le Rêve de Janou. Conte de Noël par Mireille Pradier, Imagé par Guy Sabran G. P. Paris (1943)
- Aurora, histoire de la petite princesse qui voulait apprendre à rire et à pleurer. Conte de Mireille Pradier, Imagé par Guy Sabran G. P. Paris, 1944
- Béluclaire Texte de Mireille Pradier Images de Guy Sabran G. P. Paris, 30 p. oct. 1945 et 1946. 
- Brégançon. La Légende de la reine Jeanne Texte de Mireille Pradier Images de Guy Sabran G. P. Paris, 32 p. 1945 et 1946.


Autres textes de Mireille Pradier :
- Bérylune : histoire d’une fée Illustrations de Guy Sabran Ed. S.E.M.P. 1944.
- Camping au Thibet Illustrations : 12 gouaches de Charles Desruols, Ed. Zimmermann, « Collection de l’impossible », 244 p., 1946. 


         

lundi 17 mars 2014

Tintin dans son journal en France en 1948

Le journal de Tintin en France, un événement parfois inaperçu en 1948




La presse des jeunes en cette année 1948 est dans un contexte difficile. On sait que se prépare la loi du 16 juillet 1949 sur les « publications pour la jeunesse » (déjà préparée depuis longtemps par les lecteurs militants de feu l’abbé Bethléem) et plusieurs journaux sentent si fort le vent du boulet approcher qu’ils préfèrent se saborder.
L’Astucieux, Francette, King-Kong, Mon Journal, Bob et Bobette et Les Aventures fantastiques, Le Journal de Bébé, Vaillante et Jeune Gars disparaissent. Parmi les récits complets, on ne verra plus Les Aventures fantastiques, Bob et Bobette édité par Dargaud et À l’assaut du ciel. 


C’est la rencontre entre Raymond Leblanc, éditeur et ancien résistant et Hergé, interdit de publier en septembre 1944, au lendemain de la Libération de la Belgique, qui a permis la naissance du Journal de Tintin « paraissant chaque jeudi » d’abord en Belgique, deux ans avant son arrivée en France. Le numéro 1 paru le  26 septembre 1946, tiré à 40 000 exemplaires, (épuisés en trois jours), est illustré en couverture par Le Temple du soleil de Hergé. Paraissent aussi les aventures de Blake et Mortimer de E.-P. Jacobs, L’Extraordinaire aventure de Corentin Feldoé de Paul Cuvelier. Raymond Leblanc fonde alors la nouvelle société des Editions du Lombard où seront publiés les albums tirés des bandes dessinées prépubliées dans l’hebdomadaire.


Cette apparition du Journal de Tintin dans le « plat pays » éclipse souvent l’arrivée en France de ce Journal de Tintin « le journal de tous les jeunes et de tous les amis des jeunes ». Il est édité par Le Lombard et Georges Dargaud, à Paris, au n° 60 de la Chaussée d’Antin, le 28 octobre 1948, soit deux longues années après l’édition belge, connue dans le Nord de la France par les messages publicitaires de la station Radio-Luxembourg. Ce fut pourtant un événement considérable tant il était attendu. Pourquoi ce retard ? Parce que le rival de Tintin n’est pas, comme on pourrait le croire son confrère belge Spirou, mais l’hebdomadaire catholique Coeurs Vaillants qui, sous la houlette de l’abbé Gaston Courtois diffusait en exclusivité les aventures de Tintin en France  depuis 1930. L’abbé Courtois exige que le nouveau journal ne fasse pas une concurrence déloyale au sien et fait tout son possible, selon Raymond Leblanc, pour faire échouer le projet d’implantation du périodique en France. Compte tenu de la façon plus que désinvolte dont Cœurs vaillants a publié de novembre 1947 à janvier 1949, les planches « massacrées », découpées n’importe comment, dotées de couleurs inadéquates de l’épisode Le Temple du soleil (parfois nommé Le Soleil du temple !), on comprend qu’Hergé ne publiera plus dans le journal Cœurs vaillants.     


Pour le prix de 15 francs, les petits Français découvrent neuf séries de bandes dessinées. Outre la première planche de L’Or noir et celle des aventures de Jo, Zette et Jocko dans Le Stratonef H. 22. de Hergé, des bandes dessinées réalisées par Edgar P. Jacobs pour les aventures de Blake et Mortimer (Le Secret de l’Espadon), Paul Cuvelier (L’Extraordinaire odyssée de Corentin Feldoë), Jacques Martin (Alix l’intrépide), Jacques Laudy (Hassan, le Voleur de Bagdad), les aventures de deux gamins de Bagdad et une bande anonyme de Salomone, La Princesse Zulimah. Leclerc, soldat de légende (en couverture) est une histoire illustrée par Etienne Le Rallic et il reste sept pages de rédactionnel adapté aux goûts des Français pour compléter le magazine de 16 pages. Il faudra de longues semaines de patience pour que les nouveaux lecteurs puissent connaître le dénouement des histoires distribuées au compte-goutte (à raison d’une planche par semaine), sans compter les interruptions.

(Présentation surtout extraite de « Fictions et journaux pour la jeunesse au XXe siècle, L'Harmattan, Edition 2014 », page  140.


samedi 15 mars 2014

"Je bouquine" a trente ans (2)

Je bouquine :  Trente ans, tous les talents (2)


9  11/84           Le Soupçon (BOILEAU-NARCEJAC)
                        Illustré par Vittorio GIARDINO         
22 12/85          Le Rescapé   (Yvon MAUFFRET)             
                        Illustré par AL COUTELIS ; Claire LESUEUR          
25  3/86           Le Plus beau des pièges (Patrick GRAINVILLE)            
                        Illustré par ARNO, Yves FRAYMOND        
36  2/87           Le Mystère Kamo  (Daniel PENNAC)      
                        Illustré par Jean-Louis FLOCH, couleurs : Isabelle BEAUMENAY.  
55  9/88           Catherine Certitude (Patrick MODIANO - Jean-Jacques SEMPÉ)      
                        (Texte de Modiano ; dessins de Sempé)
61  3/89           Victor et les barricades (Maryse CONDÉ)                      
                        Illustré par Marcelino TRUONG        
75  5/90           Le Défi de Serge T. (Marie-Aude MURAIL)                   
                        Illustré par DUPUY et BERBERIAN
91 9/91            L’Histoire de Monsieur Sommer (Patrick SÜSKIND)
                        Illustré par Jean-Jacques SEMPÉ       
98 4/92            La Fille d'en face (Malika FERDJOUKH)
Illustré par Yan NASCIMBENE


111  05/93       Les Iles interdites (Lorris MURAIL)
Illustré par Michel GAVIN
121 03/94        La Couleuvrine (Michel TOURNIER)
                        Illustré par Claude LAPOINTE
140 10/95        Dis-moi tout (Marie DESPLECHIN)
                        Illustré par Yan NASCIMBENE
145 03/96        Mon grand petit frère (Brigitte PESKINE)
                        Illustré par Christophe MERLIN
163 09/97        Le Naufragé du 5ème monde (Hubert BEN KEMOUN)
                        Illustré par Régis FALLER, mis en couleurs par Christophe BOUILLE
177 11/98        Le Jardin maudit (Christian GRENIER)
                        Illustré par Emmanuel GUIBERT
188 10/99        Le Club des inventeurs (Jean-Philippe ARROU-VIGNOD)
                        Illustré par Serge BLOCH.
194 04/00        La Piste de l’ombre (Un roman d’aventure) (Patrick RAYNAL)
                        Illustré par Emmanuel MOYNOT
207  05/01       Chat perdu (Jean-Noël BLANC)
                  Illustré par Daphné COLLIGNON


225  11/02       A qui le tour ? (Anthony HOROWITZ) 
                  Illustré par Jean-François MARTIN
237  11/03       Sous le même signe (Mikaël OLLIVIER)
                  Illustré par Pascal GAUFFRE
249 11/04        Une tribu d’enfer (GUDULE)
                  Illustré par Marianne MAURY-KAUFMANN
261      11/05   Les Aigles de Vishan Lour (Pierre BOTTÉRO)
                  Illustré par Armel GAULME
273      11-06  On a volé Mamy Belon (Didier VAN CAUWELAERT)
                               Illustré par Stéphane GAMAIN
279      05-07  Chasseurs d’oreilles (Erik L’HOMME)
                               Illustré par Natacha SICAUD
295      09-08 Relooke ta vie ! (Johan HELIOT)
                               Illustré par Isabelle MAROGER
305      07-09  Cœur perdu, cœur retrouvé (Anne GAVALDA)
                               Illustré par Christine CIRCOSTA
311      01-10 Le Jour d’avant (Fabrice COLIN)
                               Illustré par Frédéric LEVERT


331      09-11  Ma vie en noir et blanc (Delphine BERTHOLON)
                               Illustré par Lucile PRACHE
339      05-12  Victoria rêve (Timothée de FOMBELLE)
                        Illustré par ASEY
352       06-13 Traquée (Bertrand PUARD)
                        Illustré par Oliver BALEZ
361       02-14 La Créature (Victor DIXEN)    
                        Illustré par Dorian DANIELSEN

Chaque année de publication est illustrée par un titre. Ce choix peut paraître arbitraire et je vous demande de m'en excuser. Il dépend aussi de la documentation rassemblée et parfois incomplète.
J'ai tenu à indiquer à la fois les noms de l'auteur du texte et de l'illustrateur (parfois injustement absent de la  page de titre).

"Je bouquine" a trente ans (1)

                            Je bouquine : Trente ans, tous les talents (1)

               

Il y a dix ans, nous avions signalé le 20e anniversaire de la remarquable revue de lecture juvénile, Je bouquine, qui méritait bien un coup de chapeau, publié dans la revue Nous voulons lire n° 154,  de mars 2004, sous le titre « La revue « Je bouquine » fête ses vingt ans » (un résumé est paru sur le site de Citrouille). C’est avec le même plaisir que nous saluons aujourd’hui les trente ans de cette revue illustrée pour les jeunes de 10 à 15 ans publiée par Bayard Presse.
Encouragée par le succès du bimensuel Okapi (1971) et du mensuel J’aime lire (1978), Je bouquine, née en mars 1984, publie de courts romans inédits, écrits par les meilleurs auteurs contemporains et illustrés par les grands artistes actuels de la bande dessinée ou de l'illustration. Ni les chefs-d’œuvre classiques, ni les parutions les plus récentes, ne sont oubliés. Ajoutons une part non négligeable pour toutes les rubriques de l’actualité cinématographique, musicale, sportive ou littéraire qui intéressent les pré-adolescents.
Sa réussite est remarquable dans une période difficile pour la presse des jeunes. Avec un tirage initial proche de 70 000 exemplaires (ce tirage se situerait plutôt autour de 40 000 exemplaires aujourd’hui), la revue se porte bien même si elle difficile à trouver en kiosque. La revue Je bouquine gardera toujours son cocktail séduisant. Après des pages variées d’actualités, le roman inédit illustré occupe le plus large espace : -une soixantaine de pages, moins plus tard quand on ajoute, une histoire courte ou un feuilleton-. Puis, c'est le dossier littéraire consacré à un auteur classique, d’Homère à Le Clézio, de Swift ou Dickens à Bradbury, de Vallès ou Jules Verne à Fred Uhlman, agrémenté d'un chapitre de roman adapté en B.D… Reportages ou histoires vécues, B.D. humoristiques et courrier des lecteurs dialoguant la rédaction et avec l'auteur du récit original complètent ce magazine varié, aidant l'adolescent dans ses choix, privilégiant les droits de l'imagination et la littérature. De quoi satisfaire et réconcilier modernes et classiques. Notons l’infinie richesse de cette bibliothèque idéale pour la jeunesse, constituée mois après mois. On remarque la présence de grands romanciers connus des adultes. Les trois Patrick : Grainville, Modiano et Süskind, les deux derniers illustrés par Sempé, sont rejoints par Michel Tournier (célébrant les dix ans de la revue avec La Couleuvrine), Bertrand Visage et Tonino Benacquista. De grands auteurs populaires, tels Bernard Clavel, Pierre Pelot, voisinent avec Alain Gerber, Claude Pujade-Renaud, Claude Michelet ou Gilles Perrault… Les préadolescents retiennent plutôt les noms connus dans les écoles et les collèges. Ceux de Robert Boudet, Evelyne Brisou-Pellen, Jean Coué, Christian Grenier, Marie-Aude Murail, Jean-Côme Noguès, Jean-Paul Nozière, ou Daniel Pennac... Apparaissent les signatures féminines de Malika Ferdjoukh, Laurence Gillot, Jacqueline Mirande, Brigitte Peskine, Anne-Marie Pol, Nicole Schneegans puis Alice de Poncheville, Oriane Charpentier. Dans la deuxième décennie, les lecteurs et lectrices mémorisent d’autant mieux les noms de H. Ben Kemoun, Géva Caban, Patrick Delperdange, Marie Farré, Anna Gavalda, Gudule, Paula Jacques, Gérard Moncomble, Mikaël Ollivier, Gisèle Pineau,  M.-S. Roger ou Brigitte Smadja…, qu’ils sont lus en collections de poche, ou connus des adultes prescripteurs. C’est dans la revue que les ados ont lu les aventures de Kamo de Daniel Pennac, illustrées par J.-L. Floch, de 1985 à 1992. L’auteur incontournable, c’est Marie-Aude Murail, contant les aventures du collégien Serge T. avant 4 autres romans, percevant réalités actuelles et préoccupations des jeunes du XXIe siècle. En 1995, une romancière discrète publie Dis-moi tout. C’est Marie Desplechin, bien connue aujourd’hui.
La revue offre des histoires contemporaines, ancrées dans des milieux et des contextes familiaux divers, pour une jeunesse avide de tolérance et de compréhension mutuelle. Histoires d’amour et d’amitié, de solitude ou de solidarité, drames abordés avec tact, ce sont des miroirs tendus aux ados à la recherche d’eux-mêmes et des autres. Tous, suscitant « l’envie de vivre, le goût des autres, la curiosité vers l’inconnu », s’appuient sur le plaisir de la lecture. Les romans d'aventures, très présents au début, restent une constante. Les choix éditoriaux privilégient aussi les énigmes policières, adaptées au récit court. Boileau-Narcejac, Michel Amelin. Irina Drozd et J.-P. Nozière sont rejoints par Joseph Périgot, Malika Ferdjoukh (très présente), Michel Quint, Brigitte Aubert, Mikaël Ollivier. Les anglo-saxons John Tully et Leon Garfield voisinent avec l’angoissant Roderic Jeffries. Quel lecteur de « polars » s’étonnerait de trouver ici J.-P. Arrou-Vignod, B. Aubert et G. Cavali, F. Fajardie, Anthony Horowitz (plutôt fréquent), Michel Grisolia, Caryl Ferey, Frank Pavloff, Bertrand Puard ou Maud Tabachnik ? Les adolescents connaissent-ils mieux Paul Thiès, Jacqueline Mirande et Marie Farré (Saiont-Dizier) ou Gudule ?
Le merveilleux, le fantastique et la science-fiction sont au cœur des récits de R. Escarpit, Olivier Cohen, Joëlle Wintrebert, William Camus, G.-O. Château-Reynaud et Giorda avant qu’apparaissent Jean-Marc Ligny et Christian Grenier. Viennent ensuite pour la fantasy ou le fantastique, Erik L’Homme, Pierre Bottero, Timothée de Fombelle, Johan Heliot, Hervé Jubert, Christophe Lambert, Yves Grevet et Victor Dixen, Les évocations historiques ne manquent pas grâce à Jacqueline Mirande, Robert Boudet, J.-J Greif, Annie Jay ou Annie Pietri…
Il faut compter avec les histoires animalières : des histoires de chevaux, (dont Black-Panache, le hors-la-loi de Pelot), l’évocation des loups, du chien, grâce à Yvon Mauffret et Bernard Clavel (Akita et La Chienne Tempête)… Souvent, le couple auteur-dessinateur fait merveille. Quel régal de voir Pierre Pelot imagé par Paul Gillon, Joëlle Wintrebert par Yves Chaland, Evelyne Brisou-Pellen par Fred, Paul Thiès par André Juillard, Jean-Paul Nozière par Philippe Mignon… Plus tard, c’est un plaisir de voir associés Robert Belfiore et Yan Nascimbene, Fanny Joly et François Avril, Michel Tournier et Claude Lapointe, Bertrand Solet et Marcelino Truong, Anthony Horowitz et Jean-François Martin… ! Depuis l’An 2000, le roman illustré est plus court. On adjoint, en fin de revue, une histoire courte puis un feuilleton humoristique de Fanny Joly ou de Claude Gutman. La revue change plusieurs fois de format. En 2000, elle annonce en couverture : « Littérature, BD, cinéma et musique ». Le dossier littéraire maintient, après l’extrait de roman en B.D., une « rencontre » avec l’auteur. Peu à peu, les œuvres du XXe siècle, trouvent une large place. Les classiques de l’enfance et de l’adolescence sont illustrés (Trois hommes dans un bateau, Le Grand Meaulnes, L'Enfant et la rivière, Vendredi ou la vie sauvage...) Des romans traduits sont adaptés... Rapidement apparaissent des œuvres récentes, aux frontières du genre juvénile. Avant Frison-Roche, Pagnol, Joffo, il y eut  Colette, Giono, Kessel, B. Clavel, Andrée Chédid. L’adaptation du Chercheur d'or de Le Clézio compense son absence majeure dans les récits. La revue s’ouvre aux oeuvres internationales de Panaït Istrati, Italo Calvino, Yachar Kémal, avant des œuvres de Dino Buzzati, Satyajit Ray, Francisco Coloane ou Hamadou Hampâté Bâ...  La large place faite aux prétendus « mauvais genres », que la revue a contribués à faire entrer dans les écoles et les collèges, mérite d’être notée. Le policier « classique » des Leblanc et Leroux, Conan Doyle ou Agatha Christie, Mac Orlan et Pierre Véry, côtoie le merveilleux des contes de Perrault, d’Andersen, de Grimm, de Marcel Aymé … (mais on a oublié Pierre Gripari). Des œuvres de S-F sont adaptées : celles de Frederic Brown, Ray Bradbury, Isaac Asimov, Stefan Wul et Arthur Conan Doyle… Lire cette revue est une heureuse surprise pour l’œil et pour l'esprit : les meilleurs récits pour la jeunesse sont donc ceux d'une littérature exigeante. Ce magazine de lecture constitue une étonnante bibliothèque de romans courts inédits, écrits par les meilleurs auteurs jeunesse et remarquablement illustrés par des graphistes contemporains. Aux prestigieux anciens, Berthet, Blanc-Dumont, Caza, Götting, Juillard, Rouge ou Tito…, ont succédé des artistes nouveaux comme Martin Matje, Pierre Bailly, Olivier Balez, Delphine Collignon, Ludovic Debeurme, Vincent Dutrait, Rémy Malingrey, Philippe Munch, Bruno Pilorget, Frédéric Rébéna, Antoine Ronzon, Emmanuel Cerisier, Mathieu Sapin ou Tom Tirabasco... Nouveau logo, nouvelle maquette et nouvelles rubriques finissent par convaincre que Je bouquine a changé tout en restant fidèle à sa structure essentielle : roman inédit, plus bref, classique adapté en partie en BD et dossier littéraire et le guide culturel informant sur l’actualité littéraire, cinématographique et musicale. Ajoutons le feuilleton humoristique Marion, de Fanny Joly et de l’illustrateur Catel puis l’expérience d’écriture collective Le Collège de la lune verte.  La revue a créé le prix Tam Tam décerné à Montreuil et le concours Mini-plume (devenu Jeunes écrivains). La revue dispose d’une collection de romans et d’un blog très actif. En B.D., elle a fait connaître bien des œuvres dont Le Journal d’Henriette de Dupuy et Berberian, Nabuchodinosaure de Widenlocher et Herlé, James Bonk de Blasteau et Martin, Aya de Yopougon, etc.    

lundi 3 mars 2014

Je me souviens de Mouloud Mammeri

Je me souviens de Mouloud Mammeri


C’était au cours de l’été 1975.  Avec mon épouse, nous avions décidé de camper et de visiter l’Algérie et plus particulièrement la Kabylie en utilisant le stop et les transports en commun afin d’être en contact avec la population.
(Je sais que la chose peut surprendre en 2014).
Après le camping sauvage et la visite des superbes ruines de Djemila-Cuicul, je me souviens de l’ascension d’une montagne kabyle pour voir de près la cime de « la main du juif ». Nous avons vécu plusieurs nuits étoilées dans des sites rocailleux où nous ne pouvions voir que de rares bergers (l’un d’eux, en haut d’un col sans arbre, nous avait offert l’ombre de sa cabane et son lit pour faire la sieste). En stop, grâce à des camions, nous nous étions retrouvés dans un hameau haut perché de la commune de Beni Yenni. C’est ainsi que nous avons atterri dans le village de Taourirt-Mimoun dans lequel Mouloud Mammeri, le célèbre écrivain poète, anthropologue et linguiste, est né en 1917.
De lui, je ne connaissais guère alors que le film d’Ahmed Rachedi tourné en 1969, L’Opium et le bâton, d’après son roman paru en 1965. D’après les articles du journal Le Monde de l’époque, je savais les difficultés auxquelles il se heurtait déjà pour diffuser la langue et la culture berbère, à travers des cours bénévoles.
Quelle ne fut pas notre surprise de le découvrir au milieu de ses amis villageois, homme parmi les hommes, en train de jouer aux dominos tout en devisant joyeusement. Comme nous avions été invités à partager les festivités d’un mariage, nous avons eu la chance d’échanger quelques propos. En plaisantant, il nous disait avec un humour malicieux : « Dans mon village, il y a deux choses à voir, la mosquée et moi ». Je me souviens avoir été étonné par le français très pur et très riche, pratiqué par tous les membres de cette communauté.       
Nous avons continué notre périple et avons gagné le nord grâce à l’auto de jeunes gens qui nous ont hébergé à Tizi-Ouzou. Ils se nommaient Ahmed, Rabah et Hamid et ils nous emmenaient sur les plages de Tighzirt où nous écoutions le chanteur kabyle Idir et sa fameuse chanson Avava Inouva. (Que sont-ils devenus ?). L’hospitalité dura plusieurs jours car nos hôtes se mettaient à pleurer dès qu’on leur annonçait notre départ imminent pour Alger et la fin d’un voyage merveilleux dans un pays où l’accueil fut exceptionnel.
Dès que les Contes berbères parurent chez Bordas en 1980, je les ai lus et appréciés. Or, c’est en cette année 1980 qu’une interdiction frappa une conférence de Mouloud Mammeri sur la poésie kabyle. Ce fut, dit-on, l’origine du printemps berbère. Lorsqu’en février 1989, l’écrivain fut victime d’un accident automobile, je ne compris pas tout de suite, tant le fait est monstrueux, qu’il aurait été assassiné par le pouvoir. 
Mouloud Mammeri a payé cher, trop cher, la défense de son identité amazigue.

Je suis très fier d’avoir pu serrer la main de cet homme.