mercredi 21 mars 2018

Saint-Marcoux (1920-2002), romancière appréciée des jeunes filles des années 50-60


Jany Saint-Marcoux (1920-2002), romancière appréciée des jeunes filles

Jany Saint-Marcoux (1920-2002) est une romancière dont les principales œuvres destinées aux jeunes filles sont parues aux Editions G.P. de Paris entre 1952 et 1973.
Après avoir été journaliste dans un grand quotidien de province, Jany Saint-Marcoux publie dans la « Bibliothèque Rouge et Or » un premier roman, La Duchesse en pantoufles dont l’action se situe dans la baie du Mont Saint-Michel où l’auteur a vécu sa petite enfance.
Encouragée par un premier succès, elle va pendant une vingtaine d’années gratifier les « Bibliothèque Rouge et Or » puis « Souveraine » (à partir de 1957) de 26 récits qui font d’elle la locomotive et le solide pilier des Editions G.P.  Le récit Pour qu’un cœur batte encore qui traite en 1969 du grave problème des dons d’organe et de la transplantation cardiaque est publié dans la collection « Olympic », toujours chez G.P.
Elle épouse en 1958, le romancier Jean Sabran qui, sous le pseudonyme de Paul Berna,  est depuis longtemps un autre pilier des mêmes éditions. Toutefois, tandis que Paul Berna introduit les milieux populaires et ouvriers dans ses récits, Saint-Marcoux choisit plutôt ses héroïnes dans les classes moyennes, voire bourgeoises ou d’origine aristocratique. Elle évoque tout de même des activités agricoles ou d’élevage et l’exploitation des algues.


Les lieux de l’action sont variés et permettent parfois de valoriser plus ou moins un site ou une région : La baie du Mont Saint-Michel (La Duchesse en pantoufles), L’Alsace et les environs du Haut-Koenigsbourg (Les Sept filles du roi Xavier), le Périgord, la Dordogne et la ville de Brantôme (Domino Le Secret de Pierres-Noires), le pays basque (Le Voleur de lumière), la Provence (Aélys et la cabre d’or), Toulouse (La Caravelle).
Toutefois, Paris et ses environs sont des lieux privilégiés : Montmartre (Fanchette), l’île Saint-Louis (Les Chaussons verts), la Place des Vosges (Le Diable doux),  Paris et l’île de la Grande-Jatte (Espoir en 33 tours), le quartier parisien du Marais (Criss ou j’étais une idole), Paris et la Provence (Un si joli petit théâtre), Paris, sa banlieue et ses grands ensembles (Mon village au bord du ciel). Paris est encore choisi pour les deux épisodes de Corinne.
Les îles offrent aussi un cadre  de choix. Outre les îles parisiennes de Saint-Louis et de la Grande-Jatte, on découvre en Bretagne, l’île de Sein (Le Château d’algues), l’île de Ré (Cet été-là…) et au bord de la Méditerranée, l’île de Porquerolles (Le Jardin sous la mer) sans oublier les îles Baléares (Le Château des Baléares).
On sort de l’Hexagone pour la Tunisie (Princesse Cactus), Venise et l’Italie (L’Oubliée de Venise), l’Espagne et L’Alhambra de Grenade (La Guitare andalouse), L’Espagne et l’Italie, Séville, Rome et Milan (Aniella), (Le Mexique et la civilisation maya du Yucatan (La Princesse endormie).
Le pittoresque de certains lieux  ne doit pas cacher le fait que Saint-Marcoux ancre ses récits dans un cadre réaliste et qu’elle aborde des sujets d’actualité parfois graves : rééducation des grands handicapés (Le Voleur de lumière), création des villages d’enfants (L’Oubliée de Venise), l’alcoolisme du père et la possible guérison (Aniella), l’emprisonnement du père (Cet été-là), la vie dans les grands ensembles (Mon village au bord du ciel). Cette entrée dans la modernité se confirme avec le récit très documenté sur la construction de La Caravelle par Sud-Aviation. La recherche sous-marine sous-tend l’intérêt du roman Un jardin sous la mer.


En 1972, Jany Saint-Marcoux passe de l’écriture de romans à la direction de collections, d’abord chez Hachette (ce qui facilite la nouvelle édition de trois de ses récits dans la collection « Idéal Bibliothèque », rivale de la « Bibliothèque Rouge &t Or », puis chez Tallandier en 1976.
On oublié aujourd’hui l’immense succès de ces romans solidement construits, à la fois dramatiques, sentimentaux et communiquant un amour de la vie. Ils sont écrits lors de la meilleure période de ce que Jean Fourastié a appelé « Les Trente Glorieuses », une période où l’on salue d’autant mieux les progrès économiques, techniques et scientifiques que les guerres (en Indochine ou en Algérie) sont occultées ou  franchement ignorées par l’ensemble de la population.
Certes, Saint-Marcoux utilise ses talents de journaliste soucieuse d’une documentation irréprochable au service de sa création, mais la France et la société qu’elle décrit est globalement conservatrice surtout dans la représentation de l’épouse et de la mère de famille (quand elle est encore en vie…).

C’est dans les récits présentant les vocations artistiques que les jeunes filles semblent disposer de plus de liberté et d’invention créatrice, même si Saint-Marcoux assurait qu’elle voulait démythifier les milieux séduisants et prestigieux de la danse, du chant et du spectacle. On ne sait si, à l’égard de ce monde, elle cède à la fascination ou à une certaine réserve prudente.
Espoir en 33 tours raconte à la fois l’ascension artistique de Sylvie Duriel, élève du conservatoire, pianiste virtuose des « Préludes » de Liszt, ce qui lui vaudra l’enregistrement d’un microsillon 33 tours et celle de son ami, l’adolescent Joël, un as de la trompette de jazz. ((D’où la parution deux jaquettes pour ce roman, l’une avec Sylvie, l’autre avec Joël).     
      

Mais peut-être en raison d’une sorte de puritanisme chrétien et d’une époque encore pudibonde et timorée (nous sommes en 1960), l’élan des cœurs ne se concrétise pas dans l’élan des corps et c’est sans doute ce qui surprendrait le plus les lectrices d’aujourd’hui. Le plus petit contact physique semble exclu.
Dès 1993, Nic Diament ajoute une autre raison au vieillissement de ces récits : « Leur ancrage dans la réalité des années soixante, qui a été une raison de leur succès, les date inexorablement, et leur sentimentalité appuyée en plaît plus aux lecteurs actuels. » écrit-elle dans son « Dictionnaire des écrivains français pour la jeunesse, 1914-1991 »       
Criss ou j’étais une idole (réédité en 1973, chez Hachette sous le titre Le Temps d’une chanson) décrit admirablement et techniquement la « fabrication accélérée dune idole des jeunes. Heureusement, la chanteuse Christelle, au-delà du tourbillon de « triomphes mouvementés » saura raison garder et comprendre qu’une carrière se construit lentement et difficilement.
Corinne qui voulait aller danser s’engage effectivement dans une carrière de danseuse et Corinne et son prince doivent apprendre que le bonheur ne se confond pas avec la gloire. Marie-Bé réussit des débuts convaincants dans Un si joli petit théâtre et déjà dans Les Chaussons verts, Michèle commence une ascension de future étoile de la danse, de ballerine… mais elle renonce à sa carrière. Dans Le Diable doux, c’est à un studio de cinéma qu’accède la pétulante Tichou qui tourne un film « sous la direction du célèbre metteur en scène Bartruc ».
Les romans de Saint-Marcoux ont été traduits en de nombreuses langues.   
  

        

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